16 titres biberonnés à la littérature occulte, c’est ce que promet ‘Stranger Fruit’. La mélancolie y côtoie la rage pour inspirer l’action plutôt que l’inertie. Manuel Gagneux, chef d’orchestre de ce projet hors norme, nous parle concept, carrière et influences.
Salut ! Vous sortez un nouvel album en juin intitulé ‘Stranger Fruit’. Sauf erreur, ce titre est une allusion à un poème d’Abel Meeropol appelé ‘Strange Fruit’. Le poème a lui-même inspiré une chanson de Billie Holiday, qui est considérée comme étant une des premières chansons protestataires jamais écrites et qui condamnait l’agression constante et systématique à l’encontre des Afro-Américains dans les années 30, notamment les pendaisons publiques. Qu’est-ce que l’emphase du terme ‘stranger’ suggère ?
[Manuel Gagneux :] Elle suggère une continuation ou une croissance de ces problématiques. Nous avons certainement résolu le problème des pendaisons de personnes, mais nous sommes arrivés au point où les choses sont plus étranges et moins transparentes. Le fruit ne pend plus aux arbres, mais est étendu sur le sol, en sang.
Quelles sont les différences majeures que tu identifies entre le premier album ‘Devil is Fine’ et ‘Stranger Fruit’ ?
La différence principale est que je n’ai pas enregistré l’album tout seul. Zebo Adam m’a aidé pour la production et Marco von Almen, qui joue également avec le groupe sur scène, y a joué de la batterie. J’ai eu plus de temps pour cet album, ce qui m’a permis de plus réfléchir à sa structure et aux thèmes abordés.
Parle-nous du label qui se charge de sortir ‘Stranger Fruit’ ! Et qui sont les personnes avec lesquelles tu as travaillé sur ce nouveau disque ? Il y a toujours un certain nombre de personnes qui gravitent autour de la création d’un album, mais qui restent pour ainsi dire inconnues.
Il y a deux labels qui sortent le disque, soit MVKA, basé à Londres, et Radicalis, basé en Suisse. Puisque je vis en Suisse, je suis en contact étroit avec Radicalis. MVKA ont leur siège à Brighton, mais nous sommes tout de même en lien avec eux de manière régulière. Il s’agit d’une poignée de personnes passionnées de musique, qui travaillent exclusivement avec des artistes qu’ils aiment. Les personnes clés sont David Burger à Radicalis, ainsi que Tom Norrell et Andrew Bowles à MVKA. Ce sont toutes des personnes vraiment excellentes, qui m’ont donné la chance de jouir d’une totale liberté de création, ce qui est le meilleur scénario possible.
Les musiques afro-américaines, telles que le gospel, le blues et la soul, ainsi que le black metal semblent être les plus grandes influences pour Zeal & Ardor, mais il y a d’autres éléments qui sont ajoutés au métissage, comme la musique électronique et même les chants religieux. Quel genre est venu en premier dans ton éducation musicale ? Bien évidemment, je pense au(x) genre(s) qui t’ont poussé à devenir musicien, puis à suivre le chemin artistique que tu poursuis !
C’est le metal qui est venu en tout premier pour ma part. J’ai grandi en écoutant bon nombre de disques que mes parents écoutaient, mais c’est seulement quand j’ai commencé à écouter de la musique pour moi-même que j’ai voulu devenir créatif. Des amis m’ont fait découvrir le punk, puis le metal et finalement le black metal. Quand j’étais ado, j’étais fasciné par tous les genres de musique qui étaient durs, forts et rapides. Maintenant, j’ai une préférence pour tout ce qui est étrange.
La Suisse a une tradition de longue date de groupes metal reconnus et influents sur la scène internationale, comme Celtic Frost, Coroner, Samael, et plus récemment Knut et Cataract, pour n’en citer que quelques-uns. Est-ce que tu penses que cet état de fait est aidant pour les groupes actuels dans ce pays ?
Peut-être que savoir que la barre a été placée haut ici a un impact, mais je ne pense pas que cela constitue un avantage palpable pour la scène locale. Il y a beaucoup de groupes intéressants ici qui pourraient percer sur le plan international, mais qui toutefois n’ont pas encore reçu suffisamment d’attention.
Y a-t-il des groupes dans la scène suisse actuelle avec qui vous entretenez des liens forts ?
Nous aimons Schammasch, Zatokrev, Asbest et beaucoup d’autres groupes. Ce sont des gens fantastiques.
Quelles sont les prochaines étapes pour le groupe ?
Pour l’instant, nous nous concentrons sur les tournées. Cet été, ça promet d’être assez intense pour nous, nous jouons à tous les festivals où nous voulions aller, mais qui nous étaient hors de portée auparavant. Mais comme nous voulons assurer, nous répétons beaucoup ces temps.
Auteur : Bastien Benedetto
www.zealandardor.com/strangerfruit
FICHE CD :
Album : ‘Stranger fruit’
Label : Radicalis
Note : 4/5 (Pascal Vuille)