Yarol Poupaud est un homme qui multiplie les casquettes. En tournée avec Johnny, en projet de reprise avec Darkminou, en sortant un album solo sous son nom, ce musicien ne s’arrête jamais. L’artiste est parti en tournée cet hiver afin de préparer son premier album qui sortira en février. Une vie effrénée qui lui va bien.
Ta vie est bien chargée musicalement ! Musique de film, producteur, organisateur… Ou trouves-tu le temps ?
Tu fais bien d’en parler, y a moyen de rallonger les journées ? (rires) Je suis quelqu’un qui a toujours tendance à dire oui, quitte à le regretter. Quand un projet me motive, je réfléchis pas, quitte à le regretter plus tard niveau temps. Mais tout me nourrit, fait rencontrer des gens, vivre des expériences. Travailler sur une musique de film me faire apprendre quelque chose qui me servira à travailler sur mon album solo, etc. Si je n’étais que musicien à jouer derrière d’autres chanteurs, j’en aurai marre, si j’étais toujours en studio, la route me manquerait… Je suis assez heureux d’avoir plusieurs casquettes !
Et si tu ne pouvais en choisir qu’une ?
La scène ! Ça a des sensations que tu ne maîtrises pas : quand tu es en studio tu as le contrôle total. Sur scène, tout t’échappe.
Vous avez pas mal tourné mais pas sorti d’album.
On y travaille ! Mais on est tous très occupé, le batteur vit à Barcelone. On se voit quelques fois par an, on commence à avoir du matos mais on n’a pas envie d’avoir un album juste pour en faire un. Marco est en phase d’écriture de parole et on continuera le boulot en 2019. Mais je me refuse à donner une date pour l’instant.
Et de Blackminou à Yarol ?
Blackminou est un projet monté à Pigalle juste pour faire des reprises, juste parce que la scène me manquait. J’ai appelé des potes, mon frère, on est descendu dans le bar en bas de chez moi pour faire des reprises. Entre les tournées de Johnny, j’étais content de faire des petits trucs. On faisait des stades, c’était énorme. Mais j’aime ce côté intimiste, proche du public. C’était ça l’idée Blackminou. Ce n’est pas un groupe, plutôt un collectif de musiciens. Le guitariste est avec Indochine, le bassiste avec Etienne Daho… On a un melting-pot de gens qui se mélangent pour faire des dates. Tu vois, les Beatles ne sont pas interchangeables ! (rires) Le nom est resté comme une colle aux basques, et c’est plutôt devenu le nom du backband plutôt que d’un groupe en lui-même. Quant à Yarol, mon album sort en février, et j’ai décidé de faire des dates pour me préparer. C’est assez surprenant car le public ne sait absolument pas à quoi s’attendre. Après on s’adapte et on fait quelques reprises suivant comment le concert se passe, mais j’aime bien cette idée de surprendre le public et voir leurs réactions à chaud.
Tu penses changer des trucs sur l’album du coup ?
Bonne question. On a enregistré 16 titres mais on va en sortir 14. Certains sont supers en live mais ne sortiront pas sur l’album, ou alors en B-sides ou en édition limitée.
Tu as joué avec Victor de Dirty Deep. C’est important pour toi de transmettre ton savoir ?
Transmettre pas vraiment, c’est une collaboration qui se passe dans les deux sens. On m’a proposé d’enregistrer car j’étais dans la région et j’espère sortir un petit 45 tours, quelque chose de marrant. J’aimerais bien faire quelques collaborations et enregistrer avec des groupes de la scène locale. Paris c’est sympa, mais j’aime passer du temps dans d’autres villes, l’énergie est différente et c’est bien de sortir de Paris où l’on tourne parfois en rond et où l’on se croit les rois du monde. J’aime beaucoup voir comment les gens se démerdent et se sortent les pouces pour que les choses se passent. J’ai beaucoup de respect pour les groupes de province.
Tu as joué plusieurs styles de musique. Rock, funk, country… Il y a un style que tu aimerais aborder ?
On avait fait du rap avec FFF, et j’aimerais bien bosser à nouveau avec des rappeurs. Orelsan par exemple, Lomepal est aussi intéressant. J’avais pris une telle claque avec Run DMC et Aerosmith ! (rires) Même Cypress Hill ou Prophets of Rage, tu vois que ça marche bien ces riffs lourds avec les mecs qui rappent dessus !
Comment définirais-tu le rock aujourd’hui ?
Pour moi, c’est plus un prisme qu’un style de musique. C’est aussi une attitude, une façon de se mettre en danger. Il y a des gens qui font du rock qui n’ont pas l’attitude, et vice-versa. La musique en soit n’est plus beaucoup représentée. À la base c’est une musique d’adolescent qui se retrouve à une musique de daron qui se retrouve le soir à écouter du Led Zep avec un cognac à la main. Il y a Last Train qui cartonnent bien, Mannequins sont incroyables…. Il y a plein de gens qui ont cette énergie assez unique qui méritent un peu d’attention. Après le public ne suit pas forcément, le mainstream est trop présent. Tu vois mon gosse de douze ans il aime le rap et l’électro.
Et surtout les clubs qui ferment !
C’est dramatique ! Mais pas seulement pour le rock, ce sont des clubs d’expression, de culture. Mais ça fait du bruit dehors, c’est pas aux normes, ça crée des problèmes pour les gens qui veulent le silence. Tu vois le bar où j’ai commencé Blackminou n’avait pas de sortie de secours, tout le monde fumait dedans… Heureusement que rien n’a brûlé sinon on était tous morts (rires), mais ça a cette âme unique, on a fait beaucoup d’efforts en France pour monter des SMAC. C’est toujours un peu trop clean pour moi, mais c’est toujours ça !
Et le jour de l’enterrement de Johnny, quelle était ton impression d’avoir tout le groupe sans avoir le patron sur scène ?
C’était assez impressionnant et intense, mais j’étais très occupé par le côté technique, vu que c’était filmé. Ce qui m’a marqué, c’était les techniciens. Ils bossaient avec Johnny depuis les années 80, ils dormaient 2 heures par nuit pendant 6 mois pour que tout soit parfait, parce qu’ils l’aimaient. C’était des fans de la première heure. Et quand tu vois Roger, Michel, Gérard, en larmes, c’est très, très fort.
[Jérémy Cardot + Nicolas Keshvary]