Milieu des années 70, « A Night In The Opera » débarque dans les bacs des disquaires. A ce moment une bonne part de la critique s’amuse de la suffisance d’un groupe qui, à défaut de se rapprocher de l’inventivité de ses illustres contemporains, convoque les fantômes de la musique « sérieuse » pour se donner une légitimité.
Queen n’était pas, contrairement à Led Zeppelin , un groupe de militant, venu promouvoir sa musique au delà des tendances de son époque. Mené par un chanteur à la théâtralité ridicule, le groupe s’est toujours épanoui grâce à la superficialité du show business.
Privé de ses multiples éclairages, et éloigné de ces stades gigantesques, Freddie Mercury est plus proche du beauf de Cabus que d’une rock star. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que le groupe a explosé en 1980, avec l’album « The Game ».
A une époque de plus en plus conformiste, Queen annonçait sa soumission dès la pochette, qui affirmait fièrement l’utilisation massive des claviers. Et puis il y a eu les clips ridicules , la tenu grand guignolesque et les postures soigneusement calculées de Mercury et ses couinements de chat castré au côté d’une cantatrice. La posture à toujours été un élément important dans un groupe de rock, mais avec Queen elle prenait le pas sur la musique.
En réalité, comme Bowie à une certaine époque, Queen ne croyait plus au rock, il était donc logique pour lui de se prostituer à toutes les modes. Crée en 2009, The Struts est le digne héritier de ce nihilisme nauséabond, qui gangrène le rock depuis au moins trente ans.
Sauf que la faute des Struts est encore plus impardonnable dans le contexte actuel. Quant Mercury, dans une interview donnée au début des années 80, affirmait que le business de la musique vivait un nouvel âge d’or, on pouvait encore le croire.
L’originalité été certes limitée par des conseillés en marketing qui avaient déjà pris le pouvoir au sein desmaisons de disques , mais des artistes comme U2, Mickael Jackson , Dire Straits ou Madonna vendaient encore leurs disques par palettes.
On pouvait donc se dire que le rock n’était plus seul au sommet des ventes, et donc produire une musique aseptisée, censée plaire au goût du grand public. Mais, dans un monde où le plus gros vendeur de disque est Mozart, où le vinyle, malgré sa croissance, représente une part infime du marché de la musique , et où le streaming vole littéralement les artistes, quel intérêt peut avoir un disque comme ce « Young And Dangerous »?
Parce qu’au delà des gargouillements de Luke Spiller, qui s’embarque dans un lyrisme de fête foraine pour cacher l’incroyable niaiserie des compositions, ce qui choque c’est cette capacité à limiter l’agressivité de sa musique.
La guitare bourdonne vaguement à l’intro de « Body Talk » , mais ce sera bien la seule fois où on l’entendra distinctement. Le reste se résume souvent à un amas de clavier, agrémenté de cœurs artificiellement enjoués, à tel point que ça en devient gênant, quant on ne flirte pas avec des mélodies dignes des pires radios mainstreams.
C’est bien simple, aucun naturelle ne se dégage de ces compositions et, quand la guitare décide enfin de se faire gentiment entendre, le résultat est si propre que l’on se demande si elle n’a pas été enregistrée note par note, avant d’être overdubée.
Et puis on en arrive à des aberrations lorsque , ne crachant sur aucun artifice , le groupe part sur une sorte de hip hop à guitare sur l’imbuvable « Bullet Prof Baby » …On est pas loin du jingle pour pub Coca Cola !Pour achever la pantalonnade, les Struts convoquent Keisha, qui a pu montrer sa plastique au coté de maquereaux aussi illustres que Flo rida ou Pitbull…
En bref on a ici une démarche vieille comme le monde poussée à sa radicalité extrême, l’artificiel élevé au rang de valeurs suprêmes. « Young and Dangerous » est produit pour coller au goût d’une jeunesse qui considère la culture comme un produit de consommation.
Le résultat, sorti peut avant Halloween, pourra toujours effrayer vos amis. On le conseillera tout de même surtout à ceux qui n’ont pas peur du vide.