Ambassadrice, si l’on devait n’en garder qu’une, de notre scène musicale nationale, Sophie Hunger pouvait compter sur sa reprise de Noir Désir pour toucher le grand public francophone. Le reste de sa discographie reste largement dans l’ombre, en dépit d’une richesse reconnue par les critiques. En cause, peut-être, le polylinguisme de l’artiste qui alterne avec souplesse entre le suisse allemand, le bon allemand, le français et l’anglais.
Ajoutez-y des influences jazz qui, si elles renforcent son folk embrumé, peut l’éloigner d’un public en quête de sonorités plus faciles. ‘Molecules’ changera peut-être la donne : Sophie, aujourd’hui basée à Berlin, donne à son parcours musical un nouvel élan en s’essayant aux synthétiseurs modulaires. Marqué par une exploration permanente de la musique électronique, ce ‘Molecules’ en devient, paradoxalement, plus accessible.
On n’aura jamais trouvé la douce Sophie aussi accrocheuse que sur des titres comme ‘Oh Lord’ ou ‘She Makes President’, le single qui porte l’album. L’étiquette jazz se fait plus distante, mais l’amour de la Bernoise pour la guitare ne disparaît pas : ‘Silver Lane’ reste, par exemple, profondément folk, les nappes électroniques ne servant ici qu’à donner de l’ampleur à l’une des chansons les plus inspirées de ce sixième album. Les titres où les percussions prennent davantage de place, comme ‘I Opened A Bar’ ou ‘Tricks’, portent eux des relents krautrock, insufflant une variété bienvenue à l’album. Pas sûr toutefois que les fans de la première heure, probablement grisonnants, cautionnent ce virage, même si l’artiste réussit l’exploit de se démocratiser tout en se renouvelant.
Note : 4/5