Comment survivre à un chef d’œuvre ? Voilà la question qui a guidé toute la carrière de Slash, elle montre aussi cette difficulté de se construire un présent quand on a atteint la perfection dès le premier essai. Au-delà de toute la légende qui entoure les Guns, « Appetite » fut le réveil inespéré d’un rock englué dans les errements pop de Def Leppard et autres Toto , et dépassé en popularité par des métalleux plus aptent à déverser cette furie sonore abandonnée par Aerosmith et autres Blues Oyster Cult.
Le rock bruyant redevenais profitable, et ses vétérans en profitaient pour mettre fin à leurs décentes aux enfers. Sortie la même année que le premier Guns, « Pump » d’Aerosmith obtiendra un triomphe bien mérité , et le groupe de Joe Perry ne manquera pas de remercier ses nouveaux rejetons en participant au mythique concert des Guns à Paris en 1992.
Là , alors qu’il croisait le fer avec son héros , Slash savait déjà que l’histoire de son groupe allait bientôt s’achever. Les causes de cette fin ne sont pas très originales , et on y retrouve le mélange de drogues , de conflits artistiques , et de lutte d’égo qui jalonnent l’histoire du rock depuis l’origine. Axl Rose était parti avec le nom du groupe, laissant son guitariste trainer dans divers événements grandiloquent, oú il fut exposé comme une bête de foire au côté de Mickael Jackson, ou la chanteuse des Black Eye Peas.
Entre deux égarements, il fera de nouveau parler la poudre avec le velvet revolver, mais ce mélange hard/grunge ne tiendra réellement que le temps d’un disque honorable. Sa stabilité, Slash l’a réellement trouvé avec Miles Kennedy , chanteur d’After Brides, qui l’éloigne des bataille d’égos qu’il connut avec ces deux grosses machines que furent Guns’N’Roses et Velvet Revolver.
Plus apaisé, il sortit un « Apocalyptique Love » rafraichissant, ou l’on retrouve ce feeling à mi-chemin entre les fulgurances bluesy de Joe Perry et les solos déchirants d’Hendrix. Que Slash soit un des plus grands guitaristes de notre époque, personne ne le conteste, on regrettera juste qu’il ne soit pas aussi doué pour produire ses prochains disques.
Ainsi , chacune de ses œuvre doit être réévaluée à la lumière du live qui la suit, la production tapageuse de word on fire ne rendant pas totalement justice à ses compositions, où brille pourtant un vrai talent mélodique . Vue comme un groupe unis, les conspirator avaient une capacité rare à inventer des refrains capables de soulever les stades, mais une tendance irritante à arrondir leurs sons.
Le constat était déjà frappant sur le live au Roxy de 2014, la scène libère littéralement ces musiciens, et permet à leur guitariste de renouer avec ses heures de gloire. Là encore, avec ce « Living The Dream Tour », le groupe a fait un bond en avant, balançant les decibels avec une spontanéité qui force le respect. La jam interminable qui clôture « Wicked Stones » illustre bien cette prise de maturité. Les conspirator ne sont plus les faire valoir de Slash, ils luttent avec lui pour maintenir leur puissance hard rock dans une longue célébration instrumentale.
Plus tranchant que jamais, le guitariste au chapeau se fond dans le rythme, ne sortant de cette puissante masse sonore que pour illuminer les titres de ses solos fulgurants. Discret bassiste au style motorheadien, Todd Kerns remplace Myles Kennedy au chant le temps d’un « We’re All Gonna Die » qui ressuscite le rock paranoïaque de Lemmy. Après ce boogie lancé sur un rythme fracassant, le bassiste referme son hommage au leader de Motorhead par un « Doctor Alibi » qui n’a jamais raisonné si fort.
Et surtout, ce driving rain, qui ressemblait à un mélange hasardeux sur « Living The Dream », devient un medley rafraichissant , où l’aparté rock pompé sur leur premier disque offre une montée en puissance irrésistible.
Seul titre du répertoire des Guns, Nightrain se fond parfaitement dans la masse , prouvant ainsi que Slash n’a plus besoin du souvenir des Guns pour exister. Et ce n’est pas pour rien que le guitariste a décidé d’enregistrer dans cette salle, qui a accueilli les concerts historiques des Beatles , des Yardbirds , de Bowie , et j’en passe.
C’est dans cette histoire que notre homme veut se fondre, et avec l’harmonie qu’il trouve avec les conspirator il fait déjà partie des plus grands phénomènes scéniques de notre temps. Il ne reste plus qu’à espérer que cette puissance scénique soit enfin restituée correctement sur les albums studios.
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