Chaos ou structure. La musique du combo londonien présente toujours plusieurs facettes. Mais désormais, elle dévoile surtout une touche électro nouvelle. Le batteur Mark Richardson nous raconte cette évolution.
‘Black Traffic’ était un album brut, rugueux alors qu’’Anarchytechture’ révèle un groupe moins agressif. Surtout il prend un net virage électronique. Qu’est-ce qui vous a conduit sur cette voie?
Quand on a reformé le groupe en 2009 on a enchaîné deux albums studio et un live avant de faire une pause. Là, nous nous sommes donnés huit mois pour écrire, par sessions d’une à deux semaines. A ce rythme, ça nous laissait la possibilité de faire ressortir les meilleurs titres. Nous sommes tous de grands fans de musique électronique, dans la veine des Aphex Twin, Chemical Brothers ou Prodigy, mais nous n’avions jamais vraiment osé faire le pas. Avec ‘Black Traffic’ on avait essayé de reconstruire certains titres, mais au final nous les avions joué live parce que l’on voulait du lourd. Pour se lancer dans cette nouvelle direction, il fallait être sûr que les titres que l’on retoucherait le seraient pleinement, que cela apporterait quelque chose. Le résultat est une excellente voie entre de l’électronique et du Skunk Anansie.
Pour un batteur, c’est tout de même un peu spécial de laisser sa place à des machines.
Je n’ai pas laissé ma place à des machines, et c’est là tout le génie de Tom Dalgety notre producteur. Il m’a fait jouer mes parties de batteries en acoustique avant de les sampler. Tu peux avoir des milliers de sons, mais là ce qui est dingue, c’est que c’est ma batterie.
L’album porte un nom ambigu, une opposition entre un monde fait de règles et un autre dont les règles sont justement bannies. Comment l’expliques-tu ?
Ce titre signifie des choses bien différentes pour chacun de nous. Pour moi cela représente le fait d’essayer de construire un album autour de quatre personnes qui, elles, sont assez anarchiques (rire). Et par exemple, pour Skin, ça a une signification bien différente, elle est en train d’essayer de changer sa vie. Un peu comme si elle essayait de se reconstruire une famille, une maison, de s’imposer une structure. Elle dit elle-même qu’elle aimerait construire une maison en verre autour d’un monde en pleine révolte.
Si on fait un parallèle avec le groupe, est-ce que tu peux dire qu’il vit de manière plutôt démocratique ou anarchique?
Nous avons toujours dit que le groupe était une démocratie dictatoriale. En fait on a évidemment une leader qui est producteur exécutif, mais nous les autres on aime toujours penser que l’on a notre mot à dire (rire). Quand tu as une chanteuse aussi talentueuse que Skin, n’importe qui serait fou de ne pas suivre une telle force créative. Si les trois nous avons un avis opposé au sien, alors oui, les choses peuvent changer. Même si c’est souvent très anarchique.
Skin dit que le groupe est toujours un outsider. Mais au regard de votre carrière, de votre succès auprès du public, vous n’êtes plus si outsiders que cela.
Pourtant si. Nous sommes toujours en dehors du mainstream musical. Nous ne cédons à aucune règle d’une quelconque corporation qui dirait ce que la musique doit être. Même chez Virgin, notre contrat stipulait que l’on avait un total contrôle. Je crois que nous sommes de plus en plus raccord les uns avec les autres, nous savons d’où l’on vient, ce que l’on fait.
Alors comment dessinez-vous le futur de Skunk Anansie?
Je pense que l’on ne le dessine pas. Quand on a recommencé à bosser ensemble, on a décidé de prendre les choses les unes après les autres. On voulait être sûrs de bien prendre soin de Skunk Anansie, de chacun d’entre nous, de polir le groupe comme une pierre précieuse. Si ça marche aussi bien aujourd’hui, c’est que l’on travaille consciencieusement, on ne dilapide pas le temps que l’on y passe et on sait apprécier ce que l’on a entre les mains. On ne considère jamais les choses comme acquises.