La dernière soirée de Rock Oz’Arènes était placée sous le signe du folklore. Entre l’Irlande et la Scandinavie, les festivalier.ère.s se sont offert un vrai voyage musical.
Démarrage au ralenti
Tortilla Flat ont eu la lourde tâche d’ouvrir les hostilités. Le soleil a l’air d’effrayer les quelques festivalier.ère.s déjà présents sur le site, qui se tapissent dans les coins d’ombres, au fond de la place. Pourtant, dès que les cornemuses commencent à vibrer, on ne se fait pas prier pour esquisser quelques pas de danse. On sent qu’il n’y a aucune prise de tête dans la musique des Bernois et ça décoince vite les spectateur.rice.s. Les premières cornes à boire se remplissent déjà de bière, ça promet pour la suite !
Des airs de « dance cam » dans l’arène
Dans les Arènes, Saint City Orchestra arrivent eux-aussi devant un public quasi… inexistant. Mais les St-Gallois n’ont pas de soucis à se faire, dès les premières notes, les danseurs amateurs et confirmés envahissent l’arène en un rien de temps. Ils nous promettent le meilleur show de rock de tous les temps et ils font tout pour maintenir leur promesse. Leur énergie est débordante et communicative, tant entre eux qu’avec le public. Vu d’en haut, l’arène semble s’être transformée en parquet de danse, jeunes et moins jeunes y allant de leurs plus beaux mouvements, dans une atmosphère festive. Cette fois ça y est, l’ambiance est montée d’un cran.
Pub germano-irlandais
De grands drapeaux irlandais bordent la Scène du Casino lorsque O’Reillys And The Paddyhats débarquent. La fête est à son apogée dès le début du set. Les Allemands ont transformé le site romain de Rock Oz’Arènes en pub en l’espace de quelques minutes. Dans la foule, on se déchaîne. Et même lorsque le groupe n’a rien trouvé de mieux que de distribuer des écharpes alors qu’il fait 30°, on les suit. On repart complètement desséché, mais avec le sourire, l’œil désormais aux aguets de la pluie.
De l’Irlande à la Bretagne
Virage à 180° dans les Arènes avec Alan Stivell qui nous embarque dans un registre beaucoup plus tranquille. Malgré le peu de monde c’est un plaisir pour les amateurs de la culture bretonne et celtique de retrouver cet artiste talentueux et prestigieux. La qualité est là. Les gens sont calmes est écoutent avec passion. Plus on monte les marches des arènes, plus les résonances sont impressionnantes. Au fur et à mesure du set, le tempo s’accélère un peu. Coup de cœur, évidemment, sur « Tri Martolod » et « Bro Gozh Ma Zadoù », classiques bretons que l’on ne peut résister à chanter haut et fort. Malheureusement, la pluie menaçant de plus en plus, l’ambiance redescendra pour ne jamais remonter et on commence à perdre les festivalier.ère.s les moins avertis.
Quand la France fait revivre les scaldes
L’averse qui s’abat sur Avenches ne décourage pas les fans de s’amasser devant la Scène du Casino pour Skàld. Le concert est magnifique autant à entendre qu’à regarder. Le décor est parfait, on est projeté à l’époque viking dès leur entrée sur scène. Les voix sont en harmonie parfaite, une justesse que l’on entend que rarement. C’est beau aussi d’entendre les fans chanter ces poèmes avec eux. Les membres sont plus qu’énergiques, surtout le percussionniste qui bouge partout et se donne à fond. On n’aurait pas dit non à quelques sourires en plus de la part du chanteur, qui décoincera tout de même ses zygomatiques sur la fin du set. On ne peut nier la qualité de la performance (et sa beauté, avec le ciel qui se déchaîne), mais là-encore, difficile de tenir tout le show lorsque l’on n’a aucune notion de ce qui se passe sur scène.
Wardruna, entre perfection et imperméabilité
Pour les connaisseurs, Wardruna incarne la perfection et la finesse. Quel bonheur de pouvoir les voir, qui plus est dans ce si magnifique amphithéâtre d’Avanches. Tout comme Skàld, les musiciens sont en tenue historique, ce qui permet de mieux s’immiscer dans leur musique. L’âme est transportée dès les premières notes. Le jeu sur les sons et les nuances est impressionnant, époustouflant, créant une ambiance captivante.
Coup de cœur aussi pour les instruments originaux que l’on a peu l’habitude de voir et d’entendre. En effet, Einar s’inspire de toutes sortes de sons. Le groupe utilise donc différents matériaux qu’on trouve dans la nature (brindilles, bûchettes de sapin, galets, ect) pour en faire des instruments. Le décor sur scène est très épuré mais colle parfaitement avec la musique. Le public brave la tempête pour voir le show. Pour certains, le temps est sujet d’énervement mais pour les fans, c’est le petit plus qui permet de rendre le show encore plus époustouflant. Cette forte pluie et ces éclairs qui illuminent le ciel se sont invités en tant qu’effets spéciaux naturels ; le ciel voulait lui aussi participer à cette soirée celt/pagan. Les fans repartent conquis, avec hâte de les revoir. Pour les autres, il en est un peu autrement.
Pour les non-initiés, quelque chose nous empêche de totalement entrer dans l’univers de Wardruna. Pas la pluie. On en a vu d’autres sous des trombes d’eau, on est équipé. L’arène semble trop grande pour pouvoir pleinement apprécier leur musique. Ou trop vide. On peine à ressentir la passion des fans qui ne remplissent même pas la moitié de l’amphithéâtre. Comme pour Skàld, on ne remettra pas en cause la qualité artistique des musiciens mais ce sentiment quelque peu « il-me-manque-des-infos-pour-comprendre » plane. On essaie de chercher au fond de nous, mais à l’intérieur, rien ne se passe. Les pèlerines semblent avoir rendu les cœurs imperméables. A revoir dans une plus petite salle pour confirmer ou non ce ressenti.
Texte : Alessia Merulla & Hiromi Berridge
Photos : Davide Gostoli