Legendary, tel était le nom de baptême de la soirée du 25 octobre dernier concoctée par Bâloise Session, événement qui affichait complet. Une appellation qui n’était pas usurpée pour la venue très attendue de monstres sacrés comme Marty Stuart et Robert Plant.
Marty Stuart & His Fabulous Superlatives jouait à Bâle pour la dernière date de sa tournée européenne. Country, rockabilly et bluegrass sont des styles musicaux auxquels nous sommes moins rompus mais avec le niveau technique élevé de ces musiciens, on ne pouvait que s’incliner. Il faut dire que Marty Stuart était l’un des lieutenants du groupe live de Johnny Cash et joue de la guitare / banjo / mandoline depuis son enfance. A relever également de très belles harmonies vocales sur les titres d’inspiration gospel comme ‘Heaven’. Le public ne s’y est pas trompé et a réservé une belle ovation à Marty Stuart & His Fabulous Superlatives.
Si Led Zeppelin ne se reformera sûrement jamais, pacte de sang tacite depuis la mort du batteur et membre fondateur John Bonham en 1980, nous ne boudons pas notre plaisir à chaque projet et apparition en live de Robert Plant. Généreux, amoureux et curieux de toutes les musiques, il réarrange des titres de Led Zeppelin, d’artistes qu’il apprécie ou des traditionnels qu’il remet à la lumière du jour. Le vieux lion collabore avec des musiciens talentueux de tous les horizons. En l’occurrence, il se présentait à la Bâloise Session avec Saving Grace (Oli Jefferson, percussions – Tony Kelsey, mandoline, guitare baryton et acoustique – Matt Worley, banjo, guitare baryton et acoustique, cuatro et Suzi Dian(chant, accordéon, guitare)
C’est avec ‘The Cuckoo’, un traditionnel, que le concert débute. Les musiciens de Saving Grace prennent place et jouent les premières notes de ce titre americana. Robert Plant et Suzi Dian entrent l’un et l’autre depuis les côtés de la scène et se rapprochent du centre tout en chantant, puis se tournent vers le public. Belles harmonies vocales et lever de rideau original. On est impressionné par la qualité du chant de Robert et son timbre de voix particulier. ‘Let the Four Wind Blows’ est un titre plus rock composé du temps de The Strange Sensation. C’est l’occasion de chauffer les cordes vocales avant la réinterprétation de ‘Four Sticks’, l’un des classiques de Led Zeppelin interprétés au cours de la soirée. Visage buriné, crinière et bouc blancs, Robert nous embarque dans une remarquable version adoucie par les chœurs de Suzi Dian.
‘Angel Dance’, cover de Los Lobos et ‘Move Along Train’ chanté par Matt Worley nous amènent à ‘Orphan Girl’, émouvante chanson que Suzi Dian interprète avec délicatesse, Robert Plant assurant les chœurs… un premier frisson parcourt l’assistance. Vient alors la pièce maîtresse du concert, ‘The Rain Song’, chef-d’œuvre de Led Zeppelin. Le public a la chair de poule dès les premiers accords sur lesquels vient se poser la voix de Robert, majestueuse et tout en douceur. L’accompagnement discret à l’accordéon de Suzi Dian apporte une couleur mélancolique et nous enroule dans un soyeux châle mélodique. Montée en puissance avec le rugissement feutré du chanteur juste avant la fin du titre, on touche au divin, à l’intemporel, mythique.
Parmi les covers fort bien choisies, on relèvera encore ‘Everybody’s Song’ de Low, ‘For the Turnstiles’ de Neil Young avec le chant inspiré de Suzi Dian et ‘House of Cards’ de Fairport Convention. Des arrangements impeccables, une parfaite symbiose entre les musiciens et une tonalité plus rock, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Les fans jubilent pour le dernier titre du set, ‘Friends’, nouvel hommage très réussi à Led Zeppelin avec sa mélodie obsédante et orientalisante.
Deux rappels pour dire au revoir au public – bien que nous n’ayons vraiment pas envie de quitter la salle – avec ‘I Never Will Mary’ (cover de The Carter Family) à l’ambiance country et cerise sur le gâteau, ‘Gallows Pole’, perle musicale de l’album ‘III’ de Led Zeppelin. Final de circonstance mariant deux des principales influences de Robert Plant, la musique du sud des Etats-Unis (Leadbelly ‘The Gallows Pole’) et sa culture celtique / nordique, chaque musicien donnant le meilleur de lui-même. 14 ans après sa dernière venue mémorable à la Bâloise Session, Robert Plant a marqué à nouveau les esprits et les cœurs du public rhénan, serein et généreux, sublime anti-star.