Initialement prévue au mois de mars, mais retardée par une production de vinyles en souffrance, la sortie du huitième album studio de Rival Sons est venu finalement illuminernotre début d’été. Le chanteur Jay Buchanan, attrapé entre deux avions à l’aéroport d’Austin Texas, dévoile ce qui en a nourri le thème.
Qui sont ces darkfighters qui donnent leur nom à l’album ?
Ce terme de combattant de l’ombre m’a été inspiré par de brillantes personnes que j’ai eu la chance d’avoir dans ma vie. Ils s’investissent fort pour tenter d’améliorer les choses autour de toi, travaillent sur la solution au lieu de se concentrer sur le problème. Le titre de l’album voit un peu plus large, avec nombre de protagonistes qui gardent les ténèbres à distance. Et l’un de ces protagonistes c’est moi, quand j’écris. Il s’agit vraiment de ne pas céder à la noirceur dans laquelle on doit vivre. L’idée de « Darkfighter », est plutôt de garder les loups derrière la porte et non de les laisser entrer dans la bergerie.
Ces darkfighters t’ont-ils permis de découvrir un autre Jay ?
Je pense que les bons amis s’appuient les uns sur les autres, et chacune de ces personnes m’a certainement aidé à comprendre la valeur d’une relation, faisant de moi un meilleur ami, un meilleur père, un meilleur fils, un meilleur mari, un meilleur membre du groupe, un meilleur écrivain. Cela permet de réaliser qu’il y a toujours une lumière quelque part.
Musicalement, vous avez franchi une étape importante avec « Feral Roots », qui a connu un énorme succès. A-t-il été difficile d’aller plus loin et de créer quelque chose de nouveau après cela ?
Je ne peux pas dire que le nouvel album ait été facile à faire, bien au contraire, tant nous voulions nous assurer d’innover. Je dis bien innover, mais cela reste à l’aide de notre propre vocabulaire. Je ne pense pas que nous ayons créé quelque chose que personne n’avait jamais entendu auparavant, mais ce que nous avons fait est très réussi. Lorsqu’il s’agit d’écrire de la musique, je ne laisse pas des éléments extérieurs m’empoisonner. Je considère ma vie comme une longue initiation à l’art et chaque fois que je m’assieds pour écrire cela devient un peu plus compliqué mais plus honnête.
Sur « Rapture » tu parles de chanter fort, de hurler ta rage, en y voyant la manière de devenir toi-même. Mais ta voix parfois te laisse tomber, comme aux Docks en 2019. Certains titres de l’album ayant des mélodies plus travaillées, jouant moins sur la puissance, cela m’a donné l’impression que tu cherchais des pistes pour protéger ta voix.
Ce n’est pas le cas, sinon je n’aurais pas écrit une chanson comme Guillotine qui est dévastatrice. La capacité vocale ne se développe pas sans qu’on la mette à l’épreuve. Lorsqu’il s’agit de créer une chanson, il faut être à l’écoute de sa propre identité, être authentique, au lieu de composer quelque chose que je pourrais considérer comme gérable en concert.
« Personne ne veut mourir » évoque la mort, inévitable. Quelle est ta recette pour ne pas y penser, et que fais-tu chaque jour qui te donne le sourire ?
La clé c’est justement d’y penser. Memento mori, « souviens-toi que tu dois mourir », pour te rappeler constamment de vivre vraiment. Qu’est-ce qui me fait sourire chaque jour ? En tournée, j’aime courir, marcher sur de grandes distances, tout en explorant la campagne d’un endroit qui est nouveau pour moi. J’essaie autrement de faire un saut dans une galerie ou un musée lorsque j’en vois un. Pour un sourire garanti, j’appelle chez moi et je parle avec mes proches.
Y a-t-il un moment, quand la célébrité arrive, où il devient difficile de se renouveler, comme semble le dire« Horses Breath », où il est trop tard pour faire demi-tour.
Je ne pense pas que la célébrité ou le fait d’y être exposé fonctionne de cette manière pour moi. Je m’efforce de rejeter les prédispositions ou la dysmorphie identitaire qui peuvent accompagner la notoriété. C’est l’art, et l’art est ma vie.