Issus d’horizons artistiques distincts, les compositeurs montréalais Pur Pasteur et Xavier-Charles Fecteau s’associent par un projet de composition, ambitieux pour chacun d’eux. Unis par la création, leur talent et leur imaginaire respectif les mèneront vers Le voyage d’Héliodore, leur premier album collaboratif, le 22 mai 2024.

Univers cinématographique rétrofuturiste, c’est l’étiquette qu’on appose à priori sur cet album entièrement instrumental qui fusionne musique classique et électronique. Le pianiste classique Pur Pasteur (Nathan Giroux), compositeur de projets de danse contemporaine, de théâtre et de cirque, en plus de ses projets personnels, est en maîtrise de l’aspect acoustique. Quant à Fecteau, compositeur de musique numérique et de jeux vidéo, il se concentre sur la synthèse sonore en opérant, entre autres, un synthétiseur modulaire.

Ainsi, ils nous convient dans un véritable récit de science-fiction dès qu’on s’y prête l’oreille sur les sonorités analogiques de Prologue (Prophétie I). S’ensuit la pièce Le sentier qui s’élance avec une énergie calme et harmonieuse. C’est un morceau mémorable et très inspiré qui rappelle l’esprit de Tangerine Dream et, comme l’ensemble de l’album, de la musique ambiante allemande des années 1970. Un contraste se dessine sur Artaxerxès, piste suivante, plus lente, mystérieuse et ambiguë. C’est la seule qui implique des musiciens invités; Sar Karmier au duduk (flûte traditionnelle arménienne) et Nicolas Bernier à la batterie. Le Labyrinthe, quant à elle, s’intensifie par le jeu de piano de Pur Pasteur, qui retrouve toute son élégance sur Interlude (Prophétie II). Parallèlement, TOI 700-D s’avère le segment le plus électronique de l’ensemble musical, auquel Fecteau juxtapose des effets sonores très sensoriels. La deuxième partie de l’album, plus minimaliste, se résout à des pièces plus longues et organiques comme sur La forêt. Elle renoue avec les textures synthétiques appuyées par la pièce L’oracle. En général, l’alliance entre le piano et les synthétiseurs analogiques évolue avec fluidité. Au fil de l’écoute, on constate nettement le schéma narratif qui nous captive par la variation de ses structures mélodiques. C’est une expérience entière et aventureuse dont les influences sont comparables à Flore Laurentienne (Mathieu David Gagnon).

Véritable produit de l’autoproduction musicale, les deux instrumentistes ont eux-mêmes créé et enregistré cette trame sonore à partir de leurs domiciles, celle qui a profité d’un spectacle de lancement à la Salle Claude-Léveillé de la Place-des-arts le 26 mai dernier. De plus, un disque vinyle de cet album-concept est disponible, mettant en valeur l’aspect graphique de la pochette qui inclut un livret de 12 pages aux illustrations thématiques avec le projet, le tout signé Maud Le Guennou.

Par ce premier album collaboratif, Pur Pasteur et Xavier-Charles Fecteau se révèlent par une démarche créative habile et à la complémentarité fructueuse. En binôme, ils construisent une narration sonore stylée et bien mesurée, à l’échelle de leurs spécialités propres. Le voyage d’Héliodore demeure une œuvre accessible, qui s’inscrit dans ce renouveau de la musique instrumentale au Québec.
4/5

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