Désormais seul aux commandes de Night Beats, le chanteur et guitariste Danny Lee Blackwell s’est lancé dans un exercice de peaufinage, après les audaces soniques auxquelles nous avait habitué le trio de Seattle. Pour faire suite à trois premiers disques qui assumaient volontiers leur part de flou, le dernier membre permanent du groupe réduit la voilure psychédélique et permet un examen plus clair de son écriture.
Et c’est vrai qu’il y a de la maîtrise dans cet album qui se distingue par sa brièveté – dix chansons en à peine plus d’une demi-heure. Extrêmement travaillées, les textures des morceaux condensent tout l’imaginaire d’un rythm and blues en forme de carrefour, des grésillements secs et poussiéreux du rockabilly aux résonances fantomatiques d’une folk hybride, le tout cintré sur des rythmiques plutôt latines. Les touches oniriques, jamais gratuites, ne s’y fondent que mieux.
Le revers d’un habillage aussi référencé apparaît dans les choix de composition, trop prudents ou trop ambitieux, c’est selon. De bout en bout, c’est l’impression de déjà-entendu qui prime. Il faut dire que c’est un risque lorsque l’on décide de s’allouer les services de Dan Auerbach à la production. On se sent mis face à la tentative de réécrire des classiques, comme en témoigne ‘Stand With Me‘. Mais à ce titre-ci, et à tous les autres, il manque l’invraisemblance, l’anachronisme revendiqué qui avait servi un Edwyn Collins, par exemple.
N’empêche, même les riffs les plus rabâchés ont le mérite de ne pas s’appesantir et Night Beats a celui de laisser se succéder les pistes avec une attitude dont on ne sait pas trop si c’est du détachement ou de la nonchalance. À eux le bénéfice du doute. [Achille Kielholz]
Note : 3.5/5