Le guitariste et percu’ de Moriarty, Arthur a répondu à nos questions à l’occasion de la sortie d’ ‘Epitaph’. Un album qui sent la sueur du Sud des States et nous parle d’au-delà.
Quel est votre lien de parenté avec Kérouac et Dean Moriarty ?
Ce serait comme des parents qu’on aurait décidé de ne plus fréquenter. Y a un moment dans notre vie où ils ont été importants. Quand on relit ‘Sur la route’ on se rend compte qu’aujourd’hui cela ne nous correspond plus vraiment. Parce que notamment Rosemary, qui n’était pas encore là quand on a choisi le nom du groupe, trouve que c’est assez macho. C’est une bande de mecs qui vont dans des endroits magnifiques mais qui ne font rien d’autre que de se droguer et boire. Ils sont embués par la came et l’alcool. Ce qu’on garderait, c’est la musique jazz, très bien décrite dans le livre et la façon dont il été écrit avec ce fameux rouleau. En vingt jours, sans notes, juste avec la mémoire, on écrit un peu comme ça beaucoup de nos titres qui ont infusé pendant la tournée elles ressortent beaucoup plus tard de nos mémoires.
Ça fait cinq ans que vous avez créé le label Air Rytmo, ça a changé quoi pour vous ?
Rien, ça fait vingt ans qu’on a créé le groupe, on a été pendant trois ans dans une maison de disque. Mais on faisait déjà tout nous-mêmes, le graphisme et tout…et on revenait sur toutes leur décisions, on est des ‘control freaks’ donc faire un label était assez naturel.
Vous produisez d’autres artistes ?
On avait prévenus les Mama Rosin avec qui on avait sorti un EP et qui voulaient qu’on les produise, qu’on leur conseillait pas du tout. Mais ils ont voulu et on n’était pas très bons. Mais on a sorti le disque solo de Rosemary, ‘Birth on a Wire’, avec une violoncelliste brésilienne, un album de reprise de John Lennon à Purcell. On essaie d’avoir au moins un lien avec le groupe.
Comment avez-vous rencontré les Mama Rosin ?
A Pully For Noise il y a six ans. On a des racines un peu communes, un groupe suisse qui fait de la musique de Louisiane. On avait fait une version de ‘Ginger Joe’ avec eux, on avait essayé de leur faire croire que c’était une vieille chanson traditionnelle, mais ils n’ont pas marché. Trop intelligents et musicaux. Sur ‘Epitaph’ on a enregistré une version à nous. Nos chansons évoluent après l’enregistrement, et ‘Ginger Joe’ a subi des modifications.
Qui est ce Ginger Joe?
Cette chanson on l’a écrite avec Rose et Stéphane, on était en tournée au Japon et on est resté tous les trois à Kyoto en touristes. C’était la mousson ! On avait des vélos avec des portes parapluies, et on arpentait les rues des mauvais quartiers. A vélo la nuit avec les geishas, les garçons qui se prostituent et des vieux businessmen graisseux et à moitié mafieux, c’était complètement surréaliste. Avec ce truc ultra traditionnel et ultra technique à la fois. On traversait la ville et on pensait à un homme qui serait roux, à cause des chats roux qu’on y croisait, peut-être un trader qui a tout gagné, tout eu et qui un jour a tout perdu. On imaginait un de ces vieux Messieurs aux mines patibulaires, un clochard, il y en a pas ma à Kyoto contrairement aux autres villes japonaises). On a imaginé une descente aux enfers ou une révélation.
Vous abordez le thème de l’au-delà c’est un thème très présent chez vous : pourquoi ?
C’est plus facile d’écrire des chansons sur un thème triste que joyeux. C’est le principe des artistes. Ensuite dans nos vies, on a 35 ans en moyenne, y’a des gens qu’on a rencontrés qui sont morts donc ça nous affecte plus qu’à 15 ans. Le fait d’avoir beaucoup voyagé et rencontré des musiciens qui ont un rapport différent à la mort, en Inde à la Réunion ou en Australie, d’autres façon de voir les choses ça nous a intéressé. La mort est moins tabou ailleurs, les morts sont parmi nous derrière les plantes vertes. Le mot épitaphe on trouvait ça beau. On a beaucoup composé en tournée, on avait envie de créer des chansons qui soient plus rythmées avec des rythmes réunionnais ou nyabinghi (ancêtre du reggae) ont trouvait ces paradoxes très ‘moriarty’, plus rythmé mais aussi plus lugubre. Ça fait aussi 20 ans qu’on est ensemble, c’est peut-être le moment de s’arrêter un peu. On ne sait jamais quand on fait un album si ce sera notre dernier, donc, par précaution…
Vous avez le sentiment d’être à contrecourant ?
Depuis le début quand on a écrit le premier disque, on a toujours eu cette impression, les gens de l’industrie musicale ne croient pas vraiment en nous. Faire des chansons sans beat electro et pas formatées pour les festivals On voit dans les festivals de cet été, qu’on n’est pas assez énergiques ou je ne sais pas quoi, c’est dingue et ridicule. Je pense que si on donnait l’occasion au gens de voir autre chose, ils adhèreraient. J’ai l’impression que même les groupes indépendants sont des petites ou moyennes entreprises qui gagnent de l’agent, et je me sens pas du tout comme ça. L’épitaph c’est aussi pour l’industrie du disque et j’espère qu’on reviendra aux pratiques amateurs.
GI Jesus c’est ce type qui est revenu d’Irak ?
C’est venu dans la tête de Thomas, notre joueur d’harmonica, il y avait un truc d’onomatopées surréalistes et dada. Et il y avait l’histoire de ma cousine qu’on déjà racontée sur ‘Private Lyli’ (Gee Whiz But This Is a Lonesome Town-.2007) partie faire la guerre en Irak pour payer ses études. Elle a décidé de rentrer quand elle a vu que les fabriquant d’armes y gravaient des versets de la bible. Comme dans une guerre de religion… on imaginait ce soldat qui revient parce qu’il ne sait plus très bien ce qu’il est en train de faire. Ça pourrait aussi être GI Mohamed. On oublie qu’il n’y a pas que des extrémistes musulmans qui font la guerre.
FICHE CD
Nom de l’album : « Epitaph »
Label : Air Rythmo
Website : www.moriartyland.net