Les Portugais reviennent en force avec un album étonnant et détonnant ! Une véritable pièce de l’histoire portugaise chantée entièrement dans leur langue natale, conjuguant réflexions philosophiques et musicalité épique. Du Moonspell sombre et authentique qui prouve une nouvelle fois que le groupe ne s’essouffle pas.
Comment s’est déroulée votre tournée anniversaire pour l’album ‘Irreligious’ ?
Revivre l’époque de la sortie de l’album a été un moment de privilège. Les concerts furent de chouettes moments de célébrations pour nous et nos fans. Nous sommes contents de ne pas en avoir non plus fait une trop grande tournée car je détesterais être un groupe de reprise de mon propre groupe ! Nous avons cependant été surpris que de ne pouvoir jouer ni ‘Irreligious’ ni ‘Wolfheart’ dans certains des plus grands festivals.
Tout comme le poème de Voltaire sur Lisbonne, vous avez décidé de parler de cet effroyable tremblement de terre qui ébranla la ville en 1755. Etait-ce un moyen de rendre hommage à vos ancêtres à propos de cette catastrophe qui a sensiblement changé l’histoire du Portugal ?
En fait, le poème de Voltaire m’a accompagné durant tout le processus d’écriture. J’aime la façon dont Voltaire soulève les questions avec toute la verve et l’ironie qui lui sont propres. Le tremblement de terre de Lisbonne n’est pas seulement une catastrophe naturelle ou un terrible massacre. Il représente la sortie du Moyen-Age et l’entrée dans le Siècle des Lumières du Portugal. Nous avons voulu raconter la mort et la renaissance de Lisbonne sans la terreur de Dieu, donnant lieu à une époque nouvelle.
A l’origine, le groupe avait prévu de faire un EP. Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?
La musique nous a pris aux tripes quand nous avions fini d’enregistrer les quatre premières chansons. Un musicien doit reconnaître et mettre à profit l’inspiration quand il la rencontre. Nous n’avons pas hésité et avons attrapé cette opportunité pour en faire un album.
Quelle surprise d’entendre ta voix chantée en portugais sur tout l’album ! As-tu choisi la technique du growl pour rendre plus accessible ta langue natale aux fans ?
Nous avons simplement été guidés par la musique. Nous avons choisi le portugais car cela correspondait au concept. Le growl est approprié car je rentre dans la peau d’un personnage désespéré entre la vie et la mort, dans les ruines de Lisbonne.
Pour un groupe qui se proclame anti-religion, vous parlez beaucoup de religion dans ‘1755’….
Religion et politique ont toujours été les vrais maux de ce monde. Si l’humanité s’est développée à bien des égards, un religieux à qui on a appris à être plus spécial qu’un autre garde en lui une certaine haine. La seule façon de s’opposer est d’en parler intelligemment. Nous ne sommes pas un groupe de black metal anti-chrétien mais nous essayons d’éclairer sur les faussetés des interprétations religieuses. ‘1755’ est un album qui prouve que si la religion perd, l’humanité persévère.
Sur cet album, tu es tel un témoin au milieu du chaos : tu vois Lisbonne détruite et en feu, les corps à terre… Etait-ce une évidence d’utiliser cette approche émotionnelle ?
Le tremblement de terre de Lisbonne a été un événement terrible mais notre vrai but est de chanter sur sa renaissance et de ce qui a prévalu dans l’histoire et la mémoire collective des Portugais. Je pense que cela pourrait être l’histoire de beaucoup de personnes dans le monde.
Parle-nous de l’orchestration.
C’est Jon Phipps qui s’est occupé de tous les arrangements orchestraux. Nous aimons les orchestrations mais détestons la façon dont certains groupe de metal, notamment symphoniques, l’utilisent. Cet aspect-là permis d’accentuer le côté épique de notre histoire et même de l’expérience entière de ‘1755’. Pour autant, nous ne sommes attachés à une formule et pourrions faire un album plus simple à l’avenir sans orchestration du tout.
Vos premiers pas musicaux étaient dans le black, mais vous avez depuis bien évolé et expérimenté de nouvelles sonorité. Que penses-tu de ces groupes qui ne prennent pas de risque et restent ancré dans leur genre musical ?
Ce genre de groupes ne m’intéresse pas. Je ne peux pas les blamer non-plus, ce n’est pas facile d’embrasser le changement : beaucoup de fans critiquent, et ton succès peut en dépendre. Pour moi, il y a une partie créative qui compte plus que tout, et pour d’autres groupes, c’est de se produire devant un maximum de personne. Chacun son truc.
Peu de groupes portugais ont une renommée internationale. Comment expliques-tu le succès de Moonspell ?
On est un groupe de combattants : on vient du Portugal, on galère pour avoir une place dans les magazines, pour jouer dans des festivals, pour que nos fans ne s’éloignent pas de nous lorsque l’on change de style musical… Notre concept du succès est différent des autres groupes, et notre carrière musicale l’atteste. On a aussi bien compris qu’on était un groupe très underground, qui va galérer encore longtemps. Je pense que notre seul succès c’est de pouvoir faire ce qu’on veut, et avoir tout le même des fans qui nous suivent.
Votre tournée en Europe se fera avec Cradle of Filth.
On adore ces mecs, on est amis depuis les années 90. C’est pas des gamins qui veulent jouer au bowling lors d’un jour off et s’éclater comme des fous. Nous sommes tous des adultes avec expérience et nous partageons tous la même vision de la musique et parlons la même langue, donc je me réjouis de cette tournée !
Vous êtes également amis avec Samael : tu penses qu’une tournée ensemble est envisageable ?
C’est presque arrivé ! Mais les promoteurs voulaient que les groupes jouent gratos, donc on a dit non. Samael est la raison pour laquelle on est chez Century Media, et j’ai un énorme respect pour ce groupe novateur et surprenant. Je les écoute depuis ‘Medieval Prophecy’ et j’adore leur nouvel album. J’aime également Celtic Frost et The Young Gods, deux groupes également suisses !
FICHE CD :
nom de l’album : ‘1755’
Label : Napalm Records
Note : 4/5