Luc Barthassat – La politique du rock’n roll

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Rares sont les élus qui assument leurs goûts musicaux, surtout quand il s’agit de hard rock/metal. Tout l’opposé de Luc Barthassat, conseiller d’état genevois en charge du DETA (environnement, transports et agriculture), qui partage pleinement son amour des descentes de toms et des riffs enragés avec ses concitoyens (et il a bien raison !). Interview atypique de l’une des personnalités les plus iconoclastes de la prude Calvingrad.


Pour commencer cette interview, comment tu es tombé dans la grande marmite du hard rock ?
Quand j’étais gamin, ma mère nous faisait beaucoup participer avec mon frère au ménage. On faisait la vaisselle, les courses, le nettoyage et en échange, elle nous offrait toujours un petit cadeau. Au début, c’était des BD et arrivé à l’âge de douze ans, j’ai reçu mes premiers vinyls qui étaient le ‘Killer’ d’Alice Cooper et le ‘Machine Head’ de Deep Purple. J’ai toujours été plongé dans cet univers musical que j’ai toujours adoré, même si j’étais plus Rolling Stones que Beatles. C’est vraiment une question de rythme et d’ambiance. Alors si maintenant j’écoute un peu de tout, j’ai toujours besoin d’au moins un morceau de hard tous les deux ou trois titres.

Et quel fut ton premier concert ?
Le tout premier, c’était Joe Dassin avec ma mère, qui en était fan, je devais avoir onze ans. Sinon, pour ce qui est du rock, je crois que c’était Uriah Heep au Bout-du-Monde, mais j’ai surtout eu la chance de voir AC/DC avec Bon Scott en première partie de Black Sabbath le 13 avril 1977 à Thônex ! Et pour la petite histoire, j’ai toujours l’article de la Suisse ou de la Tribune qui disait que c’était horrible et que ça faisait beaucoup trop de bruit (rires).

As-tu déjà pratiqué un instrument voir joué dans un groupe ?
Oui, j’avais acheté une batterie chez Bernard Musique à environ quinze ans. Comme on devait souvent rester le week-end à la ferme pour vendre des œufs, avec des copains on essayait de jouer entre deux clients ce qu’on imaginait être de la musique. Ca nous a d’ailleurs valu quelques déplacements de la police. Mais on était plutôt du genre à courir voir les concerts que de répéter assidument. On faisait plus des petites démonstrations dans le jardin pour les potes.

Tu avais un nom pour ton groupe ?
(rires) oui, on avait appelé ça Syphilis Road Band

Un peu plus tard, tu as fondé le Festiverbant, petit festival de rock qui se tient chaque été à Landecy dans la campagne genevoise…
Tout à fait, on faisait chaque année une grosse soirée sur le domaine familial avec le moto club Rozon et la jeunesse de Bardonnex. Au départ, on devait être une quarantaine et le nombre de personnes augmentait de plus en plus. Au final, on s’est retrouvés avec 300-400 personnes et un pote n’arrêtait pas de nous dire qu’il fallait absolument faire un festival de rock. Du coup, on a commencé à organiser ça dans le hangar familial à Landecy avec trois amis, dont Jean-Claude Brussino qui a réalisé la série Autrefois Genève, Thierry Anet chef viticulteur du Domaine de la République et Luc Angeloz dit Léo. Notre premier concert a été le Beau Lac De Bâle qu’on connaissait un peu et qui avait fait un petit geste pour venir. Ensuite, d’années en années, on a eu de plus en plus de public et le festival a grandi, passant de un à trois jours. C’est un boulot de dingue mais on a une ambiance fantastique grâce aux sponsors et l’appui de la commune et surtout aux bénévoles. On doit avoir un public d’environ 2000 personnes par soirée et surtout on veut absolument rester gratuit ce qui n’est pas toujours évident. Mais on est vraiment une grande famille, je trouve ça magnifique.

C’est assez rare que des élus comme toi parlent de leurs styles et goûts musicaux surtout quand il s’agit de musiques moins conventionnelles. A quoi penses-tu que cela est dû ?
Il y a toujours un peu de politiquement correct, mais en même temps, tout le monde écoute de la musique. Je pense que la différence, c’est surtout que j’ai baigné pendant toute ma jeunesse dans les clubs de motards et les concerts de rock. J’ai aussi fait un peu de sécu. On se déplaçait beaucoup à travers toute la Suisse et on croisait des artistes en backstage comme Rory Gallagher voir Freddie Mercury. J’ai toujours dit, on ne peut pas jouer à l’être ou à ne pas l’être. C’est peut-être aussi pour ça que j’ai été élu, en étant un peu plus spontané et naturel que la moyenne. Certains défendent des lobbys ou revendiquent d’appartenir à certains milieux et de mon côté je fais partie de la grande famille du rock. Mais au final, je ne le revendique pas vraiment, comme tu sais, c’est surtout une manière de vivre. Ca peut parfois titiller certains et donner matière à quelques coups bas mais ça ne me touche pas. C’est mon milieu, ma passion et ma vie, j’y suis très attaché.

Sinon, aurais-tu un groupe du moment à conseiller ?
Je suis plutôt vieux groupes mais je pourrais te citer dans les groupes locaux les Roadfever qui commencent à avoir leur petit public. Il y a aussi l’ambiance de Ca Va Chier ou BACK:N:BLACK que j’aime beaucoup même s’ils font pas mal de reprises. Sinon pour la scène internationale, j’apprécie bien Airbourne qui sont très proches d’AC/DC et également Rammstein qui font des shows absolument incroyables. Mais les groupes que j’ai eu le plus de plaisir à voir en live restent AC/DC et Queen ainsi que plus récemment le concert de Bruce Springtseen à la Praille qui m’avait énormément marqué. Sinon, j’aimerais également conseiller la radio Léman Bouge, lancée récemment par Didier Tischler, et qui passe 24 heures sur 24 de la musique de la région. J’y découvre énormément de bonnes choses.

Pour terminer une petite anecdote rock’n roll à raconter à nos lecteurs ?
Comme je te disais avant, j’ai fait un peu de sécu à l’époque et les relations avec les artistes étaient très différentes de maintenant. On se retrouvait dans les loges à Paléo avec Gainsbourg, Nougaro… J’étais aussi allé voir les Sex Pistols à Londres, qui buvaient des bières à trois mètres de nous après leur concert. Aujourd’hui, c’est juste inimaginable. Les artistes et le public se respectaient beaucoup plus et c’est vraiment dommage qu’on ait perdu ce lien. Le business a malheureusement pris le dessus sur l’esprit rock’n roll.

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