L’Alsace ne fait donc rien comme les autres. Encore moins en termes de musique burnée. Alors que le Noumatrouff cède peu à peu aux sirènes de l’électro et du hype, que la Laiterie devient le lieu incontournable des grosses machines, un îlot de résistance prend de l’ampleur. Pendant que son paquebot s’est quelque peu embourgeoisé, la Foire aux Vins rassemblant plutôt des groupes expérimentés (pour être gentil), les assos colmariennes se rebellent et nous offrent donc après Live et son Rock in Hell un second fest !
Voici donc Headbang et son premier Random Fest sur la scène rodée du Grillen. Et pour cette grande première, les choses n’ont pas été faites à moitié avec pas moins de 10 groupes bien de chez nous dont 3 groupes d’importance, figures montantes avec les présences remarquées de The Earl Grey, les très chuchotés Our Theory de retour après pas mal de changements et les plus ricains de nos frenchies, les Chunk! No, Captain Chunk!.
1er jour : Hybrid + Djinn + Diana Rising + The Earl Grey + Our Theory
Cette première journée plutôt orientée metal avec en tête d’affiche les Parisiens d’Our Theory voit donc l’éclatement du plateau de tournée des CNCC, les deux derniers groupes du soir ouvrant habituellement pour les Chunk. Rude mission donc et raison sans doute de la faible affluence en fin de soirée. On y reviendra.
La soirée s’ouvre sur le mode rafraîchissement auditif, brutal pour les Djinn, scandé pour les alsaciens d’Hybrid. Dans les deux cas un show carré, tout en énergie mais qui, au final, peut lasser par un manque de variété. Pour les amateurs, ce qui n’est pas forcément mon cas.
Nous voilà en milieu de show, place aux Diana Rising. Un show attendu car une trop courte écoute lors du Woodstock fest d’Ensisheim m’avait laissé sur ma faim. C’était l’occasion de les revoir sur un set complet. Et bien, pour le coup la première impression était la bonne. Un set tout en énergie positive. Riff puissant et chant plus accessible avec contrairement aux précédents groupes, des variations d’intonations un peu plus présentes. Au final, agréablement surpris pour un groupe à suivre.
Place donc ensuite à The Earl Grey, l’OVNI de la soirée. Un groupe rock dans une soirée plutôt metal, c’était déjà un pari. Et le bougre (le chanteur) ne se laisse pas impressionner !
Dès les premiers accords une atmosphère s’installe, le chant est clair et puissant, les compositions tantôt planantes tantôt rentre-dedans. La prestation du frontman y fait évidemment beaucoup, ne calculant pas ses efforts pour aller chercher les spectateurs au fond de la salle pour les ramener en devant de scène. Clou de la soirée, le set se termine avec « la chenille », à l’invitation de l’un des spectateurs, le tout mené par le chanteur puis par un joyeux bordel sur scène. Que dire de plus ? Un OVNI, à voir absolument en live !
Dernier de cordée pour cette première soirée, les Our Theory et leur metalcore à deux voix. L’occasion pour les Parisiens de défendre leur tout nouvel EP, Renaissance unanimement salué par la critique. Le groupe a connu bien des changements : chanteur, orientation musicale, Mehdi qui passe au chant clair… On comprend mieux le titre de l’EP ! Motivés, évidemment, les OT proposent un set carré, dans la nouvelle configuration. Un style qu’on aime ou on n’aime pas, très stéréotypé (gros riffs, chant clair sur les refrains). Pour les amateurs, un bon set, malheureusement pénalisé par une salle qui s’est un peu vidée après The Earl Grey. Les parents attendent à l’entrée, il est tard ! Dommage pour les OT, à revoir.
2ème jour : Lyp + Dive Your Head + Noise Incorporation + Keys and Promises + Chunk No Captain Chunk
Cette deuxième journée orientée Rock s’ouvre par les Lyp, groupe mulhousien rock’n’roll pur jus. Si le début du show peut laisser un brin sceptique sur le côté innovant de l’ensemble, le set au final tourne rond, très rond, son impeccable, compos intéressantes, une belle découverte pour entamer cette longue soirée.
À peine le temps d’un léger rafraîchissement alcoolisé qu’entrent en scène les Bourguignons de Dive Your Head. Si les balances avaient pu laisser croire à un show 100% hardcore, ce que le début du set confirme, en fait les DYH penchent plutôt vers un crossover rapcore, très Smash Hit Combo pour prendre un exemple régional, SHC d’ailleurs présent en featuring sur un des titres du prochain album. Porté par Luca, son colosse bondissant fan de pâtes, et malgré un début de show un brin poussif, le groupe s’en sort avec les honneurs dans une soirée plutôt rock.
Même si l’ensemble part un peu dans tous les… Sens (oui je sais elle est facile, c’est l’esprit finalement) l’énergie de l’ensemble ne peut être que saluée. À revoir sur galette.
Déjà 22h, les affaires tournent, la première édition roule, respect du timing, les Headbang sont en train de réussir leur pari d’un fest’ en janvier, uniquement composé de groupes français !
Noise Inc, 3ème groupe du soir est une affaire qui tourne, enfin… d’habitude. Car si les compos du groupe de stoner ne sont pas mises en défaut sur une scène qu’ils maitrisent au centimètre près, la double basse du combo haut-rhinois va leur jouer des tours. Sans leur ingé son habituel, le son est réglé sur la première basse du set. Problème, sur les titres suivants à l’exception du dernier titre, c’est une basse spéciale 8 cordes, plus grave, qui officie produisant un ronflement assez désagréable à la longue. Oh miracle, évidemment, le ronflement disparaît au dernier titre. Dommage car le stoner rock des Noise Incorporation tient la route. À revoir.
22h40, non, 45, non 50. Les réglages s’éternisent avant les Keys and Promises. Il faut dire que les petits gars ont la pression, n’ayant pas côtoyé la scène depuis pas mal de temps. Nouvel EP, nouveau bassiste avec Cid qui reprend le manche (et la pression qui va avec ;-)), préparation d’une tournée en Russie… Cela fait beaucoup, surtout lorsque l’on sait que 75% de la salle était présente pour eux ! Alors les Keys, ils l’ont préparé, rabâché, rodé autant que possible ce show. Et c’est bien là que ça cloche.
Car si le groupe a pris un virage rock salvateur (un excellent EP en poche, la chronique arrive) loin de l’emocore de ses débuts, le show du soir est d’une irréprochabilité un chouia dérangeante. Poses, look travaillé (« c’est un boys band metal ? » entendu dans la foule), jeu de scène calé au centimètre, l’ensemble est impeccable, trop peut-être. Oui, en Russie, ouvrir le pit marchera sans doute, le faire devant ses proches et famille beaucoup moins… On leur pardonnera ces quelques erreurs de jeunesse, les Keys représentant sans doute avec les Last Train, l’un des potentiels rock les plus intéressants. Lâchez-vous les gars, c’est du rock !
Enfin ! Enfin les Chunk! No, Captain Chunk! en France ! L’un des groupes français sans doute les plus sous-estimés (avec les Lyonnais de Stereotypical Working Class) monte sur la scène du Grillen en ouverture de sa mini-tournée française. Le groupe qui écume les States avec le Vans Warped Tour a bien du mal à remplir les salles de son pays. Ils s’en sont fait une raison avec un pincement au cœur.
Les CNCC qu’on classe un peu vite au côté d’un A Day to Remember enchaînent les tubes popcore derrière un son reconnaissable à la première note.
Forts de 3 albums dont un dernier plus pop que les précédents calibrés pour les US, les Parisiens sont attendus par de nombreux fans, même si le pit s’est un peu vidé suite au départ des KAP et de l’heure tardive (0h10, comme la veille). Les perles s’enchaînent comme d’autres enchaînent les bières. The Other Line, Taking Chances, Restart en rappel, I Am Nothing Like You, l’excellente reprise des Smash Mouth All Star, Pull You Under…. Une toute petite heure plus tard d’un show qui fait la part belle au dernier album, assez bavard et quelque peu perturbé par 2 membres de The Earl Grey passablement imbibés de produits liquides locaux ou d’ailleurs (on ne sait dire si les frères Poncet s’en amusent à 100%), le set se termine sur le tout premier carton du groupe, In Friends We Trust, hymne du groupe. Un dernier titre assez bizarre, l’intégralité du pit étant monté sur scène dans un bon esprit et un joyeux bazar, le pauvre Bertrand se retrouve face à un pit… vide. Un peu compliqué à gérer mais la bouteille aidant (l’expérience, pas le contenant), le frontman s’en sort tranquillement. Un des nombreux indices démontrant que les CNCC ont désormais franchi un palier. Un groupe énorme vous dis-je.
Au final deux jours d’un excellent niveau, dans une organisation irréprochable, un peu nuancés par une affluence un poil décevante (surtout le premier soir) pour finalement un bon état des lieux des troupes françaises.
L’équipe de Daily Rock France remercie Headbang et Cid, les équipes du grillen pour leur accueil.
[NK & AG]