Jamais deux sans quatre
Alors que la noirceur et la froideur s’implantèrent doucement dans nos vies, La Tragédie en a profité pour s’y infiltrer. À l’automne 2022, le groupe présente deux mini-albums intitulés « Brûler les branchages » et « Couper les cordages ». Ceux-ci conservent la même veine Folk-rock perfectionnée depuis « Percer la parade » et « Forcer la façade », tous deux parus en 2021. Depuis, le son du groupe montréalais s’est davantage solidifié vers une avenue plus accessible et conventionnelle. Réalisées par Pieryves Décoste, ces dernières sorties clôturent le projet entamé depuis près de deux ans, celui de quatre trios de chansons qui, une fois assemblées, prennent forme en un album conceptuel.
Brûler les branchages
Lancé en octobre, « Brûler les branchages » survient treize mois après son prédécesseur. Déjà, on se laisse entrainer par « Viens danser », inspiré par la musique traditionnelle irlandaise, par la guitare classique percussive et ses paroles invitantes. Un air d’un rare entrain chez le groupe. Dans « Mon château s’écroule », on rend hommage aux Premières Nations et aux cultures minoritaires qui subsistent tant bien que mal à l’ère où tout semble mondialisé. On s’y sensibilise notamment par l’allure alarmiste de la guitare électrique et la rythmique tribale de la batterie. Pour « Le mirage », la mélodie pourvue de simples accords de guitare sèche honore la poésie intimiste du texte qui, par sa douceur et sa vulnérabilité, nous fera rêver à un amour imaginaire en simultané avec le chanteur-poète.
Couper les cordages
À l’arrivée de « Couper les cordages » en décembre, la pièce d’ouverture « Ourson en peluche » nous émeut par sa sensibilité, où la fragilité se manifeste à son comble. L’émotion va droit au but et nous effluve l’esprit dans cette courte pièce probablement fortement inspirée d’artistes tels que The Cure. Le retour aux sources qui découle du style Folk-progressif de « À l’abandon » rallie les membres à l’essentiel et soulève une force cohésive palpable. On plonge au creux d’un périple digne des années 1970 qui incarne l’aura des Shawn Phillips et compagnie. La dernière pièce « Coups de hache dans la masse », est portée par une rythmique au style musical swing, tout en s’habillant d’une sonorité punk qui défoule à souhait par l’impulsivité de l’intonation et par les propos à la fois anarchique, belliqueux et cynique du texte.
Certes, La Tragédie démontre pleinement son habileté à confectionner un concept évolutif, affirmatif et cohérent. Maintenant révélés, ces quatre opus huilent la machine pour rouler loin. À noter qu’une sortie physique en disque compact, les regroupant dans leur ordre de parution, est prévue d’ici mars 2023.
4.5/5