Modern VIntage

Lorsque je rencontre James Michaels tout sourire dans un palace parisien, ce dernier me prévient d’emblée : « je suis tellement excité par ce disque que tu vas devoir me couper quand je parlerai pour pouvoir poser toutes tes questions ». Et effectivement, il a été bavard !

Daily Rock France : Bonjour James. Comment ça va ? Comment se passe la promo de Modern Vintage ?

James Michaels : Salut ! Ca va très bien ! On a fait deux jours de promo à Londres, un à Berlin, là on est au deuxième jour à Paris.

DRF : Tu ne te lasses pas de répondre toujours aux mêmes questions, depuis le début de la semaine ?

JM : (Rires). Et bien je vais te dire un truc, la vérité c’est que les questions varient énormément d’une interview à l’autre. Je ne sais pas pourquoi, et c’est cool, mais pour ce disque, le feeling est différent pour chaque personne. Pour répondre à ta question, après avoir passé deux ans à préparer ce disque, c’est très excitant d’en parler, et donc comme je te le disais, je peux en parler pendant des heures !

DRF: Pas de problème. Pour commencer, est-ce que tu peux présenter SIXX:AM à nos lecteurs ?

JM : Bien-sûr. On a commencé en 2006, on est trois : Nikki Sixx de Mötley Crüe, DJ Ashba de Guns’N Roses, et moi-même, qui suis le producteur et le chanteur. On était tous les trois amis bien avant de démarrer le groupe, on avait aussi une sorte d’alchimie musicale, et Nikki a découvert des journaux intimes qui dataient de sa jeunesse, quand il était en pleine ascension avec le Crüe. Comme tu le sais, il était gros consommateur de drogues, et il avait donc documenté cette expériences dans ses journaux. Il les a donc retrouvés en 2005 et m’en a lu quelques passages. Il envisageait déjà de les publier, et j’ai trouvé que le contenu était vraiment beau, mais aussi très sombre, douloureux, et qu’il faudrait écrire des chansons, un peu comme une bande son. Et c’est comme ça que ça a commencé, trois gars qui écrivaient de la musique pour aller avec ce livre. A cette époque là, on ne se considérait pas vraiment comme un groupe, mais on a commencé à envoyer quelques démos à des labels. On n’avait aucune attente particulière. Et puis on a commencé à recevoir des coups de fil nous disant que « Life Is Beautiful » marchait bien à la radio, alors qu’on ne savait même pas qu’elle était diffusée (rires). On a donc du se trouver un nom, et comme on était Sixx, Ashba, et Michaels, ça a donné Sixx:AM. Ce qui était génial c’est qu’on n’était même pas un groupe, juste des amis qui faisaient de la musique ensemble, et on ne devait faire face à aucune attente, on n’avait pas à suivre de règle, et c’est cette sorte de liberté qui nous a permis d’arriver à cette bande-son pour les Heroïn Diaries. Donc une fois que « Life Is Beautiful » a bien marché, on a fini par donner des concerts, dans le cadre du Crüe Fest (ndlr : festival itinérant centré sur Mötley Crüe, qui a eu lieu a l’été 2008 en Amérique du Nord), et on s’est retrouvés à jouer devant des foules conséquentes, ça a vraiment bien marché. Tout en conservant cette même vibe que sur le premier album, on a écrit « This Is Gonna Hurt ». Là encore, ça a vraiment bien marché, et je me retrouve à parler maintenant avec toi du disque suivant (rires). Ce second disque nous a vraiment permis de définir le son qui nous caractérise, mais aussi le fait qu’on n’aime pas avoir de règles, juste faire de la musique qui nous plaît, sans trop se soucier de la réaction des gens. Pour Modern Vintage, on est partis avec l’idée de faire un disque qui révèle qui on est en tant que groupe, contrairement aux deux précédents disques, qui étaient vraiment des supports aux livres. C’était donc la première fois qu’on partait d’une feuille blanche, mais on savait déjà quelle musique on aimait, et l’idée a été de revenir justement aux bases, et à ce qui fait qu’on aime la musique : on a réécouté beaucoup de vieux rock des 60s, du Queen, du David Bowie, du Elton John, et tout un tas d’autres artistes qu’on adore. On s’est demandé ce qui faisait qu’on aimait autant cette musique, et il en est sorti qu’aujourd’hui, la perception qu’on les gens du rock, et sa définition même, est très restreinte. Ça convient sûrement à certains, et tant mieux pour eux, mais quand tu écoutes un disque de Queen, c’est comme un voyage, toutes les chansons sont différentes, et pourtant c’est toujours du rock. On avait trouvé l’idée directrice de notre disque, et on s’est dit que certains n’accrocheraient probablement pas, mais d’autres vont comprendre le message et c’est à ces gens là que Sixx:AM s’adresse ! Et là je viens de battre le record de la réponse la plus longue à une question en interview je crois, non ? (rires).

DRF : Oui mais tu as aussi répondu à certaines des questions que je comptais te poser donc ça reste raisonnable.

JM : Parfait !

DRF : Cela dit j’en ai encore d’autres… Tu disais que Sixx:AM avait, à ses débuts, une totale liberté, due au fait que personne ne vous attendait, etc… Mais là vous avez sorti deux disques qui ont vraiment cartonné, vous avez donné peu de concerts, mais sur des énormes scènes, donc cette année, les radios, les fans, les journalistes vont vous attendre…

JM : Tu sais, pour un groupe, n’importe lequel, faire ce que les gens attendent est réellement le piège dans lequel il est le plus difficile de pas tomber. On a vraiment fait le disque qu’on voulait faire, et même le single, Gotta Get It Right, a été choisi justement parce qu’il sonne différemment de ce qui passe à la radio habituellement. On a été agréablement surpris de voir que malgré tout, cette chanson marche bien sur les ondes et est régulièrement diffusée, mais je pense que c’est peut être aussi parce qu’on a voulu faire quelque chose de rafraîchissant. On ne voulait pas se répéter, et j’imagine que ça a plu de voir qu’on avait l’effort de proposer quelque chose de vraiment nouveau. Mais pour moi, Gotta Get It Right est vraiment une chanson rock !

DRF : Bien-sûr, mais plus sautillante et joyeuse que les balades rock-FM habituellement diffusées…

JM : Clairement ! Après, on a aussi un label qui ne nous met pas la pression du tout. On leur a présenté pas mal de démos, et on s’attendait à ce qu’à un moment donné, ils nous calment un peu et nous disent que ça partait dans tous les sens…mais non, ça leur a plu ! Ils nous ont même dit de prendre autant de temps que nécessaire pour finir le disque, et franchement, c’est le genre de chose qui n’arrivent jamais ! On a vraiment été chanceux.

DRF : Sixx:AM est, jusqu’à present un side-project : tu as tes activités de producteur et d’ingé son, Nikki a probablement été très occupé à préparer la tournée d’adieu de Mötley Crüe, DJ Ashba a pas mal tourné avec les Guns…Comment avez-vous procédé pour la composition et l’enregistrement de Modern Vintage ?

JM : C’est une bonne question. La première chose, c’est que pour toutes les phases « créatives », on était toujours tous les trois. Donc effectivement, on a dû trouver le temps de se réunir, et mettre en parallèle nos agendas pour trouver des créneaux. On a commencé à écrire il y a deux ans, et c’est vrai qu’on a mis du temps à sortir ce disque…Mais on se retrouvait on écrivait tous les trois, et ça finissait systématiquement par l’enregistrement de petites démos. Après ça, je rentrais chez moi à Nashville, et je les retravaillais dans mon studio, puis j’allais ensuite rejoindre DJ à Vegas…

DRF : Même pendant que la residency des Guns là-bas ?

JM : Non non, crois moi, c’était vraiment dingue à ce moment là pour DJ, et on a été un peu en pause. Mais quand je pouvais aller chez lui avec mon studio portable, on enregistrait ses parties, puis je faisais la même chose avec Nikki, et je rentrais chez moi, et c’était reparti pour un tour…crois-moi c’était vraiment dingue, je prenais l’avion trois fois dans la semaine ! Et j’ai fait ça pendant pas loin de deux ans ! Mais ce projet nous tenait vraiment à cœur, et on a mis un point d’honneur à ne pas se mailer nos enregistrements, etc.. De nos jours, tu peux enregistrer un disque super facilement sans même que les membres du groupes n’aient à se voir une seule fois, mais ce n’était clairement pas la vision qu’on avait de Sixx:AM, et à la fin ça en a valu la peine. Mais pour répondre à ta question, ça a effectivement été un gros challenge.

DRF : Tous les membres du groupe ont été réellement occupés ces derniers temps. Avec la retraite de Mötley Crüe, Nikki sera libre…Est-ce que Sixx:AM est appelé à devenir un groupe qui tournera régulièrement en support de ses disques, ou est-ce que cela va rester un side project ?

JM : Clairement, on va profiter du fait que Nikki ait plus de temps. De plus on a déjà trois disques, donc c’est largement suffisant pour qu’un groupe puisse partir en tournée. On également une fanbase qui commence à devenir importante, et il y a une grosse demande pour des shows de Sixx:AM, ce qui est flatteur. On a vraiment envie de de se consacrer à ce groupe, et on va donc tourner pour Mordern Vintage.

DRF : J’imagine que je ne suis pas le premier à demander, mais compte tenu du fait que vous êtes majoritairement connus en Amérique du Nord, est-ce que vous allez venir en Europe également ?

JM : Oui, et oui ! (rires)

DRF : Un peu plus personnellement, tu es une sorte de couteau suisse de la musique : producteur, ingénieur du son, chanteur, multi-instrumentiste…Quel a été ton rôle précis sur ce disque ?

JM : J’ai pas mal travaillé sur ce disque. Je suis le chanteur principal du groupe, j’ai fait les arrangements des voix, joué pas mal d’instruments, j’ai fait le sound engineering, le mixage, etc… Ca fait beaucoup, mais ça marche bien parce que c’est ce que j’adore faire. DJ est un showman, mais il n’aime pas passer des heures et des heures en studio, tout comme Nikki d’ailleurs…Alors que moi j’aime ça, passer des heures à triturer des pistes dans tous les sens pour obtenir exactement ce que j’avais en tête. C’est aussi un peu mon rôle de pouvoir m’occuper de toutes ces choses pendant que les deux autres sont sur la route, et je me sens bien dedans.

DRF : Es-tu également le batteur sur ce disque ?

JM : Non. C’est d’ailleurs la première fois qu’on prend un batteur. Sur le premier disque, on avait des parties de batterie programmées sur ordinateur. Sur le second, c’est un mix entre des parties que j’ai jouées, et de la programmation. Disons que je jouais des trucs, et que je les reprenais ensuite, je ne suis pas un super batteur, mais j’ai étais capable de faire ce dont on avait besoin (rires). En revanche, sur Modern Vintage, et toujours pour être fidèle à ce concept d’hommage aux vieux disques, j’ai pu engager Jeff Fabb, qui joue pour Black Label Society. Je l’ai rencontré quand je produisais le disque de James Durbin, je pense que vous ne le connaissez pas ici, c’est un des vainqueurs de American Idol (ndlr : équivalent américain de la Nouvelle Star). Il m’a littéralement scotché. J’ai produit et enregistré des batteurs exceptionnels, parmi les meilleurs du monde, mais lui m’a vraiment mis une baffe. Quand il a fallu enregistrer Modern Vintage, le choix a été évident…Je l’ai fait venir dans mon studio, à Nashville, pour quatre jours, et on a enregistré toutes ses parties. Il a clairement marqué le disque de son empreinte, et d’un point de vue de producteur, je peux vraiment te dire qu’il est phénoménal !

DRF : On parlait de variété au sein du disque, ça va carrément jusqu’à avoir un morceau presque funk, avec Miracle…

JM : C’est justement un bon exemple ! On voulait célébrer nos influences. Je suis un énorme fan des Bee Gees, et ça va te surprendre mais Nikki également. DJ a également des goûts très éclectiques. On était en studio et on voulait sortir des carcans du rock. L’un d’entre nous a mentionné qu’on pourrait faire un morceau un peu disco. DJ a commencé à jouer ce riff très funky, j’ai commencé à chanter dessus, on s’est lâché, et à la fin on s’est demandé : « est-ce qu’on a vraiment joué ça ? » (rires). Comme je te l’ai dit à maintes reprise, ça collait à l’esprit du disque, donc on l’a conservée, et j’en suis très fier !

DRF : En revanche, la chanson qui clôture l’abum, Before It’s Over, a une vibe très old-school…

JM : C’est vrai qu’il en ressort un aspect assez vaudevillesque, mais depuis les premiers jours de Sixx:AM, on a toujours voulu montrer des contrastes : sombre/clair, triste/joyeux, etc… C’est aussi quelque chose qui nous définit en tant que groupe. On essaie toujours de donner une ambiance ou des paroles qui traduisent l’espoir. Sur cette chanson, si tu écoutes les paroles, ça parle de cette personne qui est terriblement seule, parce qu’elle a perdu quelqu’un mais ne parvient pas à faire son deuil. Certaines personnes peuvent passer au delà de ce genre d’événement assez rapidement, en sortir plus fort, mais lui n’est pas comme ça. Il voudrait, mais il ne peut pas. On a des paroles très empreintes de tristesse et de douleur. Je me demandais quand est-ce qu’on pouvait être le plus seul, et je pense que c’est quand on est entourés, mais qu’on se replie sur soi-même, et l’idée à été de faire apparaître ce contraste : la partie instrumentale est plutôt joyeuse, comme si on était entourés de gens, et les paroles sont tout l’opposé.

DRF : C’est quelqu’un que tu connais personnellement, ou de la fiction ?

JM : Oui et non…On met toujours beaucoup de nous-même dans les chansons, mais on met aussi un peut de tout le monde, et c’est peut-être pour ça que Sixx:AM marche bien…Quand on joue une chanson, on révèle une petite partie de notre personne, mais quand un fan écoute cette même chanson, elle lui parle également et révèle aussi une partie de lui, une connexion se crée. Donc pour répondre à ta question, un peu des deux.

DRF : Parlons un peu de toi à présent… Tu es avant tout connu pour être un producteur, tu travailles habituellement avec de très grands noms (ndlr : Mötley Crüe, Scorpions, Alanis Morissette, Papa Roach…). Dans les mois à venir, tu nous a confirmé que Sixx:AM allait prendre beaucoup de ton temps, est-ce que tu vas poursuivre tes activités de production ?

JM : Tu sais, je dois être un des gars les plus chanceux du monde : je produis, j’écris des chansons pour d’autres groupes, j’adore mixer des disques…et en plus j’ai Sixx:AM qui me permet de vivre ce rêve de gamin, ce fantasme, d’être dans un groupe de rock. Ces dernières années je suis passé par pas mal de phases, je mixais beaucoup, puis j’écrivais beaucoup et là j’ai consacré beaucoup de temps à Sixx:AM. Donc oui, je vais continuer mes activités. Évidemment, peut être que je ne produirai pas de disque l’an prochain parce qu’on va certainement tourner pas mal, mais varier les activités me permet de réinventer en permanence.

(ndlr : l’attaché de presse nous fait signe que l’interview se termine).

DRF : On voit souvent des disques se terminer par une cover, alors je vais terminer cette interview par une question sur une cover : tu peux nous raconter la petite histoire derrière l’interprétation de Drive, de The Cars ?

JM : On voulait de toute façon faire une reprise, et c’est Nikki qui a pensé à cette chanson. C’est un énorme tube, qui a pas mal marqué les gens. Si tu écoutes les paroles, tu te rendras compte que c’est une chanson parfaite pour Sixx:AM. Les paroles sont terriblement tristes, mais en même temps tu as cette beauté et cet espoir qui y sont très présents, et c’était un bon choix pour nous. On voulait donc la moderniser un peu, toujours en suivant cette ligne directrice dont je t’ai parlé, tout en mettant l’accent sur la tristesse des paroles. En fait cette chanson est très linéaire, et on n’est pas trop un groupe qui joue des chansons linéaires habituellement, donc évidemment, on a essayé d’ajouter de la dynamique tout en conservant également cette atmosphère un peu intime. Pour l’anecdote, sur cette chanson, on a utilisé un accessoire appelé Vocodeur, et cet outil est très populaire de nos jours : si tu écoutes la radio, tu vas l’entendre dans la moitié des chansons. Ca te permet de donner une touche un peu moderne à ton son, mais en fait, c’est un vieil outil, c’était moderne dans les années 70 ! Et on revient toujours à ce principe de Modern Vintage (rires).

DRF : Merci beaucoup de nous avoir accordé un peu de ton temps ! 

JM : Merci à toi, et à tes lecteurs, on se recroisera l’an prochain quand on passera jouer en Europe !

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.