C’était une explosion que personne n’avaient vu venir, l’Allemagne n’étant pas forcément une terre où l’on s’attend à trouver un nouveau mouvement marquant du heavy metal. Pourtant, devenue mondiale, la notoriété des heavy metalleux anglais à considérablement marqué la jeunesse teutonne. Ces groupes furent les phares dirigeant un genre désormais émancipé de l’influence du hard rock, sa puissance n’étant plus compatible avec ce feeling issu du blues, qui fait la grandeur des descendants de Led Zeppelin. Symbole de cette émancipation, la légendaire compilation « Death Metal » , sortie en 1984, montrait un bouillonnement créatif comparable à ce que fut les sixties pour le rock.
Symbole de cette explosion culturelle , cette compile regroupait aussi bien les premiers riffs mélodiques de Running Wild et Helloween , que les agressions plus sombres de Hellhammer. Il ne restait plus à ces musiciens qu’à confirmer ses premières secousses, pour Helloween il faudra attendre 3 ans. Heureusement, « Keeper of The Seven Key Vol 1 » fut enfin le monument auxquelles toute une nouvelle scène allait se frotter. Ses mélodies lyriques, accentuées par la voix suraigüe de Kiske, posaient les bases d’un genre théâtrale, porté par des guitares ultras rapides, le tout centré sur un concept enjoué, plus proche d’un roman de Lewis Caroll que de la noirceur tolkennienne .
Le volume deux, plus long, donne un peu moins cette sensation de prendre une claque vivifiante, on soulignera tout de même qu’il reste à un niveau d’efficacité exceptionnelle. Mais la formule inventée par Helloween, trop répétitive, était aussi sa principale faiblesse, chaque nouveau disque diluant l’impact de son heavy metal festif. Sans doute conscient de cette faiblesse, Kai Hansen partit rajeunir ses riffs de guitare en fondant Gamma Ra, projet qui lui permettra de sortir encore quelques disques remarquables.
Son départ est le premier symptôme d’un groupe en plein déclin, qui ne peut modifier sa formule, sous peine de lynchage critique. Moins agressifs, Chameleon et Pink Buble Go Appe furent lynchés par la critique et les fans et c’est au tour du chanteur Michael Kiske de claquer la porte.
Ce départ, malgré les apparences, va permettre à Helloween de trouver un second souffle. Aussi brillante soit elle, la formule implacable contenue dans les « Keeper Of The Seven Keys » dépendait beaucoup de la voie de castrat de Kiske , qui ajoutait lyrisme et puissance à ses mélodies tranchantes.
Son départ oblige le groupe à partir dans une direction plus sombre et dramatique, la voie de Andy Deri étant plus banale que celle de son prédécesseur. Voila pourquoi ce « Keeper Of The Seven Keys the legacy », sorti en 2005 , ne partage avec son prédécesseur qu’une filiation thématique. Si les premier Keepers présentaient un monde parodique et enjoué, « The Legacy » baigne dans une ambiance plus sérieuse et angoissante. Le lyrisme est toujours là, mais c’est un lyrisme plus guerrier, servie par des guitares plus lourdes et tranchantes.
L’intro donne tout de suite le ton , portée par une voix grave , qui fait un peu penser à celle enregistrée par Christopher Lee sur le disque des Hollywood Vampires. Puis Andy Derrie démarre le bal sur une mélodie solennelle, soutenu par une choriste semblant chanté depuis le Vahalla , dernière demeure des braves morts au combat.
Puis la batterie nous fait entrer dans le dur, martelant le rythme avec une force de brute , qui ne se calme que pour laisser la guitare placer des solos déchirants. « I will show » crie les cœurs de ce « the King of a 1000 years » , comme un combattant livré à une destinée tragique. Puis c’est toute l’armée qui semble se joindre à ce hurlement guerrier , faisant partir cette mélodie épique dans une danse tribale annonçant les boucheries sonores à venir. On repart ensuite dans une ambiance de pandémonium , qui ouvre la voie des rafales de guitares, qui semblent en quête de sang.
Treize minute de bonheur, voilà ce qu’est ce « King of a 1000 Years », qui présente ce qui nous attend de la plus belle des façons. Car, si la rupture avec le passé est évidente, Helloween garde tout de même cette capacité à créer des mélodies épiques, portées par des riffs irrésistibles, qui ne manqueront pas de vous faire headbanger à en perdre la tête.
Le seul défaut que l’on pourrait trouver à ce disque, encore une fois, c’est sa durée. Ce disque ne dévie jamais de la formule présentée plus haut, et se contente d’en accentuer la violence ou la noirceur sur certains titres. Sur un disque de 40 minutes, la formule aurait été implacable, et l’auditeur aurait été reconnaissant de se voir offrir une telle claque heavy. Mais « Keeper Of The Seven Keys The Legacy » dure plus de 70 minutes !
Résultat, l’effet de surprise s’étiole sous les répétitions d’un enchaînement immuable , et on en vient presque à regretter que la maison de disque n’ait pas limitée l’ambition de ses poulains. Ce n’est pas pour rien que les deux premiers volumes, que le groupe voulait au départ sortir sur un double album, sont finalement sortis sur deux disques séparés.
Helloween est une machine efficace mais limitée et son pire ennemie reste le temps, son efficacité ne s’exprimant pleinement que sur des disques relativement courts. On soulignera tout de même que, malgré ce défaut non négligeable, « Keeper Of The Seven Keys The Legacy » reste un excellent album de power metal. Il serait donc dommage de bouder la réédition proposée aujourd’hui par Nuclear Blast.