Intro (Sandra)
3 jours, 2 scènes, 40 groupes. C’est le résumé de ce qui nous attend ces 3 prochains jours sur la place de l’aérodrome d’Interlaken pour notre festival préféré, le Greenfield, prêtes à encaisser décibels, émotions et expériences en tout genre.
Les festivités s’ouvrent par le traditionnel cor des Alpes à 14h00. Il y a quelque chose de complètement kitch dans le son de cet instrument mais qui sonne bien entendu tout à fait à sa place dans le décor montagneux du Greenfield.
Pour bien se remettre dans l’ambiance, de savants calculs ont été menés pour donner quelques informations sur la programmation 2023. Tout d’abord, sur les 40 groupes présents, environ 1 tiers sont des groupes n’ayant jamais foulé les terres sur lesquelles nous nous trouvons. Les années de fondations des groupes vont de 1982 (Die Ärzte) à 2016 (The Hu) et leur nationalité est en grande partie étatsunienne (13), suivis de près par l’Allemagne et la Suède dans le top 3. Au total, 5 groupes suisses seront sur scène. Cinq, c’est aussi le nombre de femmes total que l’on a compté sur environ 180 musiciens au total.
Less Than Jake – « Did we take the time to really discover how little we know about each other ? » (Pauline)
Après les traditionnels « Alphornbläser » pour ouvrir les festivités de ce week-end sous le signe du metal – plus particulièrement du plomb, aux vues du soleil qui s’abat sur la place d’aviation d’Interlaken, Less Than Jake s’empare de la Jungfrau Stage et de son public déjà bien présent en ce jeudi 14h30. Donnant le coup d’envoi du festival, les Floridiens craignaient de se produire devant peu de monde, mais les nombreux.ses spectateur.trice.s les ont rapidement rassurés. Le ton de cette édition est donné : le ska de Less Than Jake est un vrai appel à la fête et l’ambiance « feelgood » se fait très vite ressentir auprès des festivalier.ère.s. L’ambiance monte d’un cran avec « All My Friends Are Metalheads », présent sur la BO de l’indémodable Tony Hawk’s Pro Skater 4. Le groupe invite sur scène un jeune homme affublé d’une coupe mulet pour « Lie To Me », ajoutant « … tell me my hair looks good » et le ciel commence à s’assombrir et se charger de nuages, n’empêchant aucunement le public de se lancer dans les premiers circle pits de ce Greenfield 2023. À n’en pas douter, cela ne fait que commencer…
Enter Shikari – « There’s no sign of stormy weather? » (Sandra)
Le ciel chargé s’est transformé en gouttes éparses qui détonne avec les paroles d’une chanson de 2ème groupe : « There’s no sign of stormy weather ». Outsider du rock alternatif / post hardcore électronique, Enter Shikari a au moins le mérite d’essayer de nous injecter son énergie survitaminée même si le public peine à les suivre au début. Leur petit grain de folie ne les empêche pas d’apporter un aspect engagé dans leurs paroles. Leurs intros électro nous font parfois nous demander si l’on est bien au Greenfield et la combinaison de sons à la fois aériens et cheesy résulte en un mélange détonnant. Passant du chant hyperclair au chant crié puis rappé, on peut dire que la polyvalence vocale est bien exploitée. L’écoute en festival quand on ne les connaît que peu est tiraillée entre leur bonne humeur entrainante et la difficulté d’accès à leur style qui mélange tant d’influences et peut partir dans tous les sens qu’une écoute au casque serait plutôt indiquée pour en saisir tous les aspects. Si ce n’est pas vraiment notre came, ça a le mérite d’être rafraichissant !
Donots – «Alles glänzt, alles scheint – für einen Moment, alles leicht » (Sandra)
Place à des habitués des lieux car il s’agit de leur 10ème passage ici selon les dires de Ingo Knollmann au début du live de ce festival qu’il a qualifié de « schönste Festival in der Schweiz ». On ne va pas le contredire ! Le premier mot qui me passe par la tête quand on parle des Donots, c’est « sympathiques ». Ils jouent un de leurs derniers single, ‘Heut ist ein gut Tag », qui vient appuyer mon avis en démontrant leur joie de jouer et leur façon de voir les choses en un peu moins noires qu’elles ne le sont. Ils font partie de ces groupes allemands (et pourtant eux chantent en anglais la plupart du temps) plutôt boudés par les Suisses romand.e.s. Mais nos voisins Suisses allemand.e.s se font un plaisir de nous emporter dans leur entrain devant la scène. Avec leur habituelle reprise de « We’re not gonna take it » de Twister Sisters, le festival décolle vraiment et nous met de bonne humeur pour le concert suivant malgré la pluie qui se fait plus insistante.
Menzingers – « Was your heart beating in the first place? » (Sandra)
Ce qu’on apprécie au Greenfield, c’est cette absence de jugement sur les groupes qui sont « assez punk » ou « trop pop pour du punk ». Dans la série des groupes de punk rock les plus sous-estimés, le quatuor de punk-rock de Philadelphie mené par Greg Barnett et Tom May fait partie de ceux que je prendrais sur une île déserte si j’avais à choisir 5 groupes à emporter avec moi. Ces mélodies, ces notes simples, ces refrains irrésistibles, cette vulnérabilité ostensible et cette honnêteté dans les paroles desquelles on se sent si proches nous donnent une première occasion de perdre notre voix. Le soleil le ressent et revient. The Menzingers, c’est aussi le dernier groupe que j’ai vu avant la période du Covid, souvenir de concert gardé et chéri, idolâtré durant ces longs mois sans concerts. Avais-je idéalisé la capacité de ce groupe à faire partir mes émotions en tourbillon sauvage ? Absolument pas. Est-ce que je m’enjaille un peu d’avoir revu un de mes groupes préféré dont chaque phrase, chaque mot me donne envie de les hurler en cœur avec eux ? Absolument. En plus, nous avons eu droit à une nouvelle chanson « There is no place in this world for me » ainsi que l’annonce du futur album en automne. Et c’est compliqué après un des points culminant de la journée de repartir voir la suite du festival. C’est bientôt l’automne, dis ?
Hollywood Undead – « Them haters try to get they hate on » (Pauline)
Dans un set aux couleurs de leur tout dernier album, « Hotel Kalifornia », sorti cette année, la fine équipe d’Hollywood Undead met le feu à la Junfrau Stage. Plus qu’un simple concert, c’est une vraie fête que nous proposent les Californiens, séduisant autant les adeptes que les curieux.ses venu.e.s découvrir ce groupe de rap rock. Le groupe ira même jusqu’à qualifier la foule de « la meilleure devant laquelle ils n’aient jamais joué ». Bien qu’on apprécie le compliment, il reste difficile de penser que ce n’est pas une phrase passe-partout pour flatter leur audience. Ou peut-être est-ce simplement en raison de l’accueil survolté que le public a fait aux titres emblématiques du groupe, tels que « War Child » ou « Everywhere I Go » ? Qu’à cela ne tienne, dans le cas où leurs classiques ne suffisaient pas, Hollywood Undead assume les covers, reprenant les mythiques « Du Hast » de Rammstein et « Enter Sandman » de Metallica, avec une ressemblance redoutable. C’est en agitant le drapeau suisse sur « Undead » que Hollywood Undead quitte la scène pour laisser sa place à The Hu. Mais avant cela, détour par l’Eiger Stage pour Sleep Token.
Sleep Token – « You know you hypnotize me always » (Sandra)
Autre groupe masqué du festival, l’ambiance installée par le groupe aurait pu prendre bien plus d’ampleur de nuit. Mené par le leader Vessel, le groupe est entré dans le top des artistes rock/metal les plus écoutés aux USA, en 123ème position tout de même. Ces personnages que l’on n’aimerait guère croiser dans une ruelle sombre radoucissent leur image par leur musique finalement pas si violente que ça. Beaucoup de mascarade pour une musique pas assez ancrée et un résultat qui sonne un peu vide et nous laisse plutôt indifférentes, dans tous les cas pas en accord avec les tendances actuelles.
The Hu – « Монгол билээ » (Sandra)
De temps à autre, il y a un ovni à l’affiche d’un festival… The Hu (à prononcer « The Hou ») avaient fait parler d’eux lors de la sortie du morceau ‘Yuve Yuve Yu’, faisant découvrir au monde leur style, le ‘Hunnu rock’, du heavy metal avec des instruments traditionnels mongols. C’est aujourd’hui au tour du public d’Interlaken de vibrer. Car ce n’est pas que la disto qui vibre avec eux, le chant traditionnel mongol diphonique étant si guttural qu’il n’a rien à envier aux autres groupes de metal ! Une touche d’originalité qui fait du bien à cette programmation et nous fait voyager au niveau des sonorités mais pas que ! Le chant Khöömij étant avant tout utilisé dans les cérémonies chamaniques, c’est aussi dans un voyage d’un autre genre que nous emmènent The Hu. Ces instruments peu habituels dans le metal ajoutent certes une curiosité à leur live, mais je ne peux m’empêcher de penser que si l’on enlevait tous les instruments, leur performance n’en perdrait que peu de puissance tant elle passe par leurs voix et leur prestance sur scène. On avouera que forcément, quand on est 8 sur scène, ça aide, mais on a vu des groupes de 8 membres louper leur live, donc non, ça ne fait pas tout !
Papa Roach – « We’re not nameless, we’re not faceless, we were born for greatness » (Pauline)
Comme toujours, les shows de Papa Roach sont survoltés. Pyrotechnie, jeux de lumière au soleil couchant, tubes intemporels, … Le cocktail est explosif ! Le tout couplé à l’énergie du frontman Jacoby Shaddix, impossible de rester de marbre. Le showman parcourt la foule sur une civière, jette des bonbons dans le public, saute sur les crash barrières et court un semi- marathon lors de leur set d’une heure et demie. Les tubes s’enchaînent, des old school comme « Getting Away With Murder » ou « Between Angels and Insects » aux plus récents tels que « Help » ou « No Apologies ». L’occasion de saluer la richissime discographie de Papa Roach, qui a su sans cesse se réinventer au cours de 30 ans de carrière. Et comme si leurs tubes originaux ne suffisaient pas, ils nous gratifient de luxueux covers. Ainsi pouvons-nous entendre le début de « Loose Yourself » d’Eminem en intro de « Broken Home », l’instrumentale de « Lullaby » de The Cure et « Firestarter » de Prodigy. Puis l’ambiance change avant « Scars », Shaddix annonçant le décès la veille de l’un des plus fervents fans de Papa Roach, le grand-père de Jerry Horton, guitariste du groupe. Les briquets et lumières de téléphone s’allument pour marquer ce moment. Le concert s’achève sur les notes de « Last Resort », incontournable titre de Papa Roach.
Die Ärzte – « Immer mitten in die Fresse rein » (Sandra)
Aller voir Die Ärzte au Greenfield, c’est y aller autant pour le groupe que pour le public. C’est que s’ils ne sont pas si populaires dans nos contrées romandes en raison de la fameuse barrière des langues, ils sont une véritable institution en Suisse Allemande ! Le groupe berlinois de Farin Urlaub et Bela B, habitué du Greenfield et des setlists à rallonges, nous balance tube sur tube : Schrei nach liebe, Deine Schuld… Ceux qui sont surnommés « Die beste Band der Welt » ont clos cette première journée en beauté. En les voyant sur scène, je ne peux m’empêcher de me dire que c’est le groupe qu’il aurait fallu me faire écouter à l’école pour me donner envie d’apprendre mon voc d’allemand !
Entre 2 scènes (Pauline)
La foule intense réunie devant l’Eiger Stage pour le concert de While She Sleeps nous a permis d’assister au concert à une certaine distance de la scène. Tout était réuni pour un show d’exception, dont une setlist renversante avec entre autres le puissant « Sleep Society », une guitare phosphorescente et une présence scénique surpuissante.
Funny anecdote : La traduction française du carton permettant l’accès au parking VIP, une autre victime de la barrière des langues en Suisse.