Il y a encore quelques mois, je vous avoue que je n’avais encore jamais entendu parler d’Estas Tonne. C’est ma grande sœur, dont j’ai hérité quelques vinyles originaux des 70’s, qui m’a fait découvrir la musique du guitariste ukrainien. Un univers de spiritualité, de tolérance et de partage culturel qui inspire, apaise et unit.
Grâce à Universal Sounds – qui produit la tournée suisse de l’artiste – Estas Tonne a trouvé dans la salle de l’Alhambra un écrin sur mesure pour sa musique délicate. Deux autres dates helvétiques étaient également planifiées, à Zurich et à Saint-Gall. Comme la plupart des concerts du guitariste, celui de Genève affichait complet depuis belle lurette.
Le parcours d’Estas Tonne est atypique, puisque né en Ukraine (dans la ville actuellement déchirée de Zaporijjia) où il apprend très tôt la guitare classique, il suit sa famille qui s’installe en Israël. Il abandonnera l’instrument pendant plusieurs années avant de découvrir sa voie et une vraie passion pour la guitare aux Etats-Unis au contact d’autres musiciens, dont le violoniste virtuose Michael Shulman. Estas, troubadour des temps modernes, jouera dans le monde entier, puisant sonorités musicales et spiritualité au cours de ses nombreux voyages.
Dans le cadre du « Fusion Spring Tour », Estas Tonne était accompagné de deux percussionnistes d’exception, Yonatan Bar Rashi (darbuka, bongos, cajon) et Ben Aylon (Senegalese drums et xalam). Ces deux derniers artistes, par leur finesse de jeu, tantôt donnaient davantage de puissance à la guitare tantôt en soulignaient la délicatesse par de subtiles touches. Le public a pu également apprécier une grande complicité au sein du trio et parfois des notes d’humour dans ses joutes musicales.
Un concert d’Estas Tonne est une expérience à part entière, une invitation au voyage de deux heures et demie. On se laisse porter par la mélodie, envoûtante, qui se fait douce comme un murmure puis gonfle comme une voile prenant le vent avant de déferler puissamment. Des influences musicales orientales, flamenco, gypsy (on pense parfois à Al DiMeola) mais aussi plus introspectives (Mike Oldfield « Ommadawn »). La virtuosité du guitariste n’enlève en rien l’émotion de son jeu de cette grande pièce musicale en plusieurs tableaux. Le public est ébahi de se retrouver déjà à la fin du concert, plus de deux heures après les premières notes égrenées par Estas, et applaudit à tout rompre dans une standing ovation à la fin du rappel. Une soirée magique dont on ressort un peu meilleur.