Marc Zed de Zolla Productions a gracieusement accepté de répondre à nos questions avant le concert de Simonak, Big Vein et Now Future à l’Escogriffe le 25 février dernier. Généreux de son temps, notre discussion nous permet de jeter un peu de lumière sur le monde des acteurs actifs de la scène locale montréalaise. Première d’une série d’entrevues avec des bookers et artistes de la scène underground, nous allons vous présenter une fois par mois, le profil d’un acteur actif à Montréal ou en région de manière à vous montrer qui sont ceux qui font rouler les roux de l’univers culturel québécois si particulier.
DR: Quand est-ce que tu as commencé à booker des concerts?
MZ: Ça remonte à probablement 4 ans, avec mon ancien groupe. Je n’avais pas de compagnie de booking à proprement dit, c’était plus une affaire DIY, où je contactais directement les salles pour produire mes concerts et organiser des petites tournées. L’année dernière, j’ai commencé à produire de plus en plus de concerts avec d’autres groupes, mais encore sous mon nom et c’est là que je me suis dit que tant qu’à le faire, je devrais mettre sur pied ma propre compagnie, Zolla Productions, que je pourrais utiliser pour produire mes propres concerts. Donc ça fait 1 an sous la bannière Zolla Productions, mais ça fait beaucoup plus longtemps en fait que je fais ça.
DR: Donc est-ce que tu produis surtout ton propre groupe ou est-ce que c’est un véhicule pour produire d’autres groupes?
Habituellement, je produis mes propres concerts ou du moins je partage la responsabilité avec une autre compagnie de production, surtout lorsque je fais affaire avec un groupe qui ne vient pas de la région. Mais j’ai tendance à faire affaire avec CJLO ou la page Stoner Rock Army, qui vont s’occuper de la publicité de manière plus active. Par contre, pour ce qui est de recruter les groupes, contacter les salles, faire produire les tracts et les affiches, c’est moi qui s’en occupe.
DR: Est-ce que tu as surtout tendance à rester à Montréal ou est-ce tu cherches à booker en dehors de l’Île?
MZ: Évidemment, la majorité de ce que je produis se trouve à Montréal, mais là j’ai commencé à organiser des mini-tournées pour des groupes en Ontario et au Québec. Donc on se déplace entre Hamilton, Barry, Ottawa, Toronto, Montréal, ça pourrait aussi être à Québec ou à Sherbrooke. J’ai des contacts aux États-Unis, donc je peux aussi organiser des spectacles à Burlington par exemple.
Je m’apprête d’ailleurs à partir en tournée aux États-Unis avec The Hazytones, c’est une bonne opportunité pour moi d’agrandir mon réseau de contacts pour éventuellement organiser des tournées avec mon groupe Pink Cocoon. Donc mon réseau s’agrandit de plus en plus, mais pour le moment la majorité de se que j’organise est à Montréal.
DR: Donc avec combien de groupes joues-tu en ce moment?
MZ: Je dirais que c’est surtout mon groupe Pink Cocoon mais sans être un membre officiel, j’ai joué avec le groupe de ma sœur Foolish et je m’apprête à partir avec The Hazytones en tant que bassiste, pour le temps de la tournée. Mais je ne suis officiellement qu’avec Pink Cocoon.
Et as-tu un album avec Pink Cocoon?
Pour le moment il n’y a que le EP Aliénation de 6 chansons qui est disponible pour le moment. L’album s’en vient.
DR: Donc on a parlé de l’étendue de ton réseau de salles à Montréal et ailleurs, est-ce que tu te concentres surtout sur les salles et les autres bookers que tu connais ou est-ce qu’il y a des canaux plus officiels pour organiser des concerts ailleurs dans la province et au pays?
MZ: C’est pas mal le même principe pour ce qui est des concerts locaux et en dehors de l’île. Si je connais le booker de la salle, je l’appelle, je vais le voir ou je lui envoie un message directement, mais si je ne connais pas la personne en charge de la salle, je lui envoie un email plus générique. Mais évidemment, si je connais la personne, le contact se fait plus facilement.
DR: Est-ce qu’il y a beaucoup de compétition interne entre les compagnies de productions, pour produire des spectacles à Montréal ou est-ce que tout le monde fait ce qu’il a à faire sans se déranger?
MZ: Évidemment il y a de la compétition. Si c’est pour un vendredi ou un samedi, certaines salles sont réservées quelques mois en avance. Et maintenant il y a de moins en moins de salles de disponibles (plusieurs salles ont fermé leurs portes dans les dernières années). Il faut donc se prendre en avance si on veut avoir les soirs les plus populaires et certaines compagnies ont le contrôle sur quelques salles en particulier, donc c’est beaucoup plus difficile de se produire là. Il y a une compétition naturelle, mais je ne crois pas qu’elle soit négative, dans le sens qu’on doit absolument avoir plus de visibilité qu’une autre compagnie ou un autre événement. C’est surtout une question d’avoir accès aux meilleurs soirs. Par exemple, dans les salles où on n’a pas de réputation, c’est beaucoup plus risqué pour elles de te réserver un vendredi ou un samedi soir. Elles doivent s’assurer de maximiser leur occupation et leur chiffre d’affaires.
DR: Comment est-ce que tu organises la publicité pour un événement? As-tu une stratégie particulière ou est-ce que tu y vas au feeling?
MZ: Avec le temps, j’ai remarqué qu’il faut commencer environ 1 mois avant la date de l’événement. Pour certains spectacles, on peut même prendre 3 mois pour annoncer le concert. On passe par les médias sociaux, avec un Sponsored Post sur Facebook de manière à rejoindre un public plus vaste. On peut aussi emprunter une voix plus Old School et passer des tracts dans la rue et dans les salles. Le bouche-à-oreille est aussi efficace, en parler à ses amis et surtout les groupes qui font leur publicité de leur côté pour solliciter leurs fans et leurs amis. Dans le cadre d’un plus gros concert ou d’un festival, je contacte les radios locales de manière à donner de la visibilité aux groupes et à l’événement. Je peux aussi me fier à des pages comme Stoner Rock Army pour faire la publicité pour les événements qui les intéressent plus. Tout dépendant de la taille de l’événement, je peux imprimer jusqu’à 300 tracts que je vais distribuer dans la ville et pour d’autres, je me concentrerai sur les médias sociaux avec différentes approches correspondantes aux différentes bannières, tels Instagram, Facebook ou Twitter. C’est évident que les médias sociaux jouent un rôle important, on ne peut pas s’attendre à attirer une bonne foule si on se concentre seulement sur les moyens traditionnels.
DR: Au niveau des médias sociaux, as-tu une présence active sur plusieurs groupes?
MZ: Je suis abonné à la grande majorité du tout groupe public ayant rapport à la musique au Québec. Que ce soit Punk-Rock Montréal, Montréal Rock Shows, Montreal Professional Musicians ou DIY Touring. Il y en a des centaines dans chaque ville. La meilleure chose à faire pour un promoteur est de tous les joindre. Dès qu’on produit un concert, il faut être capable de rejoindre le bon public, le public qui est le plus propice à venir voir ton spectacle.
Il faut aussi coordonner où et quand afficher sur les différents groupes, parce qu’avec le nouvel algorithme de Facebook, si tu ne fais que copier/coller le même événement partout, tu risques de te le faire bloquer.
DR: Quand tu as organisé le Punk Meets Doom Festival aux Katacombes (le 15 février), tu avais une commandite de Pizza. C’est une drôle de commandite. Comment est-ce que c’est arrivé?
MZ: Un de mes amis travaille dans une cuisine, la Cuisine 0-8, et son groupe jouait ce soir-là. Il voulait amener de la pizza, donc on a fait un échange de service; Il fournissait la pizza pour la soirée et de mon côté, je faisais la promotion de Cuisine 0-8. Pour les festivals où il y a des artistes visuels en plus de musiciens par exemple, c’est intéressant d’avoir de la nourriture ou quelque chose du genre, parce que le public ne vient pas seulement voir le spectacle, il faut que ce soit une expérience plus complète.
DR: Comment est-ce que tu organises tes événements quand il faut mélanger différents genres de groupes?
MZ: Étant donné que tu vas avoir deux publics différents qui ne se retrouveraient pas nécessairement dans un autre événement, il faut au moins que les groupes soient quand même complémentaires. Je ne mettrais pas un groupe de reggae sur la même scène qu’un groupe de Trash Métal. Mais avoir un groupe de Punk et un groupe de Doom peut fonctionner parce que les communautés sont complémentaires et la musique se ressemble. Les thèmes sont similaires, mais le Doom est juste plus lent. On peut donc avoir un public hybride, qui est plus propice à apprécier tout l’événement. Il y a différents types de mixtes de public qui sont intéressants, mais l’important est que les différents publics soient complémentaires. On ne veut pas que le public du premier groupe parte après la performance.
DR: Est-ce que l’expérience totale est affectée par le concert hybride?
MZ: C’est quelque chose que l’on voit souvent dans différentes villes on n’y peut rien. On essaie de s’arranger pour que la programmation soit claire pour que tout le monde sache qui joue quand.
Dans certaines villes les gens ne vont voir que leurs amis jouer. À Montréal, la scène underground est plus développée et on remarque une plus grande ouverture dans le public. Les gens en général sont ouverts à différents genres musicaux et le mixte de genre n’est pas aussi néfaste pour l’expérience de concert.
Je tiens à remercier Marc Zed pour son ouverture durant l’entrevue. Son expérience en tant que promoteur de concert et en tant que musicien dans la scène fait de lui une référence importante dans l’histoire orale de la musique underground à Montréal.
Si vous voulez en savoir plus sur sa programmation de spectacles à venir, vous pouvez vous référer à sa page Facebook