Après avoir triomphé au festival Guitare en Scène en 2022 et mis le feu (lol) à la Scène du Casino de Montreux en juillet dernier lors du MJF, Christone ‘Kingfish’ Ingram revenait sur nos terres dans le cadre du festival Antigel. Une magnifique occasion d’apprécier à nouveau ce jeune (tout juste 26 ans !) prodige de la six cordes du Mississippi, fer de lance prometteur de la nouvelle vague du blues rock contemporain.
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En ouverture de soirée, c’est Lös Gatillos qui dégourdit le public déjà nombreux dans la belle salle de l’Alhambra. Le quatuor genevois est composé de musiciens expérimentés aux univers musicaux aussi divers que singuliers. On pense parfois à Tom Waits, on voyage souvent en terrain surréaliste ou dadaïste, une musique pour le moins étonnante et originale.
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Christone ‘Kingfish’ Ingram est tombé dans la marmite de la musique tout petit, né dans une famille musicale au sens large du terme. Il a appris à jouer de la batterie à six ans, de la basse à 11 ans avant de passer à la guitare. A ses 15 ans, il recevait des offres de marques de guitare pour faire de la promotion et il a rapidement attiré l’attention de ses pairs. Trait d’union entre le blues traditionnel (B.B. King), le rock psychédélique (Jimi Hendrix) et le blues rock contemporain (Joe Bonamassa), Kingfish est un vrai rassembleur. Par le passé, il a aussi bien joué avec Buddy Guy qu’avec le rappeur Rakim ou le groupe post punk Vampire Week-End. Et pour avoir décroché 5 Blues Music Awards à 21 ans et un premier Grammy Award à 22 ans, on peut dire que la valeur n’attend pas le nombre des années pour ce brillant jeune homme.
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Accompagné d’un bassiste, d’un claviériste et d’un batteur, Kingfish ouvre le concert avec ‘Midnight Heat’, blues rock que n’aurait pas renié Robert Cray. Par rapport à sa prestation de Guitare en Scène, on est surpris par la maturité du chant de l’artiste. A la suite, ‘Fresh Out’, un blues pur jus que le guitariste a composé en 2019 avec Buddy Guy, un vrai régal. La fluidité de son jeu et son habileté à passer d’un registre intimiste et délicat à de puissants riffs au quart de tour sont stupéfiantes. ‘Empty Promises’ – cover de Michael Burks – est également un long blues sur lequel le public se délecte, Kingfish donnant une leçon d’expressivité sur ses riffs virevoltants. ‘Not Gonna Lie’ est un blues rock tendu qui électrise le public tandis que ‘Mississippi Night’ se calque sur les plus grands classiques du blues à la B.B. King.
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On a apprécié les accents funky comme sortis de la B.O de ‘Shaft’ sur ‘Hard Times’ qui font onduler l’Alhambra et qui mettent en avant la virtuosité du claviériste. Moment intimiste et émouvant lorsque Kingfish interprète ‘Rock and Roll’ en mémoire de sa maman décédée en 2019, son inspiration et sa plus fidèle fan. Un peu plus tard, il descendra dans la fosse, au beau milieu du public et y jouera plusieurs minutes pour son plus grand plaisir. Retour en puissance avec ‘Outside of This Town’ et son rythme bien marqué et balancé avant que ‘662’ aux notes southern rock ne mette un point final au set. Après un passage en coulisses, Kingfish revient pour deux rappels, tout d’abord ‘Long Distance Woman’, blues rock bien pêchu, avant la cerise sur le gâteau, ‘Hey Joe’, hommage à Jimi Hendrix, l’une des grandes influences de l’artiste. Longue ovation de l’assistance multigénérationnelle qui sortira enchantée de cette soirée et suivra de près l’évolution de la carrière de Kingfish.