« Vous arrive-t-il d’avoir peur de ne pas pouvoir changer le cours des choses ? » Devait-on voir dans les paroles de « Do I Wanna Know », tête de gondole de « A&M » le dernier effort des Arctic Monkeys, une sorte de prémonition à la communication entourant la sortie de ce premier album en cinq ans ? A considérer que cet inamovible cours des choses pourrait bien ressembler au succès de leur musique, on ne serait pas loin de penser qu’Alex Turner et ses camarades ont choisi par crainte de trop déstabiliser, de ne dévoiler avant la date fatidique même moins que le minimum syndical de leur nouvel album. Car oui, hormis les toutes petites quarante secondes du teaser annonçant la sortie de cette nouvelle galette, c’était mystère et boule de gomme. La surprise est donc complète lorsque débarque les premières mesures comme en suspension d’un « Star Treatment » porté juste par une voix de crooner lascive. Quelques notes de piano, une rythmique nue, le quartet emprunte sans attendre des chemins de traverse et tient à surtout ne pas se retourner pour voir s’il est suivi. Il laisse derrière lui les grandes envolées rock, les mélodies faciles, les structures simples, les guitares accrocheuses. Les claviers prennent le relais et font porter le regard sur des espaces larges, des pleines vierges de codes. Pleines où Turner trouve un terrain de jeu exaltant pour sa prose. Alternant chant mélodique, approche soul ou phrasé plus mécanique, il porte à lui seul une grande partie des ambiances. Pourtant avec l’enchaînement « One Point Perspective / American Sports » ses acolytes pointent à leur tour le bout de leur nez, déposant des textures d’une richesse folle aux quatre coins de leurs virées. La basse de Nick O’Malley venant même s’offrir une forme de duo entêtant avec le chant sur un « Tranquility Base Hotel + Casion » sommet de ce sixième album. Las, si nombre de titres amènent des découvertes musicales enthousiasmantes, une certaine uniformité dans l’approche stylistique fait pointer comme une forme de lassitude à force d’avancer dans l’écoute de ces onze titres. Reste que les Arctic Monkeys ont changé leur cours des choses, et que ce pas fait de côté est le meilleur chose qu’ils aient pu offrir à leur musique. Leur avenir est à nouveau lumineux.
Note: 4/5