L’Olympia accueillait Ange pour un double concert, dernières dates de la longue tournée ‘Cunégonde’. Le samedi 1er février avait une saveur particulière car c’était la dernière prestation scénique de Christian Décamps (79 ans en août prochain), le dernier père fondateur du groupe, créé 55 ans plus tôt, encore en activité. A cette occasion, la soirée a été captée pour le plus grand plaisir des fans, amis et musiciens venus de tous les horizons (Japon, Italie, Belgique, Suisse et des six coins de l’Hexagone). Pour la petite histoire, le concert d’Ange a été retardé de 30 minutes en raison d’un gréement défectueux du matériel d’enregistrement qui a failli tomber de la mezzanine. Que d’émotions décidément !
Le sympathique Pat O’May, le plus Irlandais des Rouennais ou vice versa, ouvre la soirée avec ses musiciens. Le public a pu (re)découvrir les beaux titres de ‘Welcome to a New World’, album conceptuel flirtant avec le rock progressif et le hard rock mélodique. Pat est aussi habile au chant qu’à la six cordes et nous gratifie également d’un medley jubilatoire de titres d’Alan Stivell avec qui il a joué 13 ans plus tôt dans la même salle. Une belle standing ovation viendra récompenser la généreuse prestation d’un Pat O’May heureux et très ému.
C’est ‘Hadar – Mumbai – Lhassa’, un long instrumental de ‘Cunégonde’ – l’album à paraître en septembre prochain – qui est diffusé en attendant que le groupe ne prenne place sur scène. Entrée triomphale d’Ange avec les riffs de Hassan Hajdi sur ‘Les Larmes du Dalaï Lama’. Les artistes sont tout sourire devant cette vague d’amour qui les emporte. Chacun dans la salle est conscient du côté historique de ce concert qui s’apparente davantage à une grande et belle fête de famille.
Pas de surprise au nouveau de la setlist, la même depuis quelques mois, mais quelle intensité émotionnelle ! Chacun donne le maximum, le Père Christian est très en voix et partage le chant avec son fils Tristan, transition et passage de témoin naturels. On frémit avec ce dernier sur ‘Les Yeux d’un Fou’, on s’amuse avec Christian sur ‘La Suisse’, toujours d’actualité, et le public découvre ‘Quitter la Meute’, encore un titre à paraître sur ‘Cunégonde’ et qui donnera son nom à la tournée automnale. La chanson éponyme, ‘Cunégonde’, est appelée à devenir un classique d’Ange. Christian la fait sienne, l’interprète avec sa théâtralité et son lyrisme émouvants. Les premières larmes naissent au coin des yeux des fans. Le patriarche poursuit dans la poésie avec ‘Si j’étais le Messie’ dont l’assistance reprend les vers cultes avec lui.
Un panachage de classiques intemporels (‘Godevin le Vilain’, ‘Quasimodo’, ‘Réveille-Toi’) et titre inédit (‘Pace Nobilis’) nous amène au chef-d’œuvre, ‘Capitaine Cœur de Miel’, sublime hymne de plus de 15 minutes. Christian, au sommet de son art, chante cette épopée de toute son âme, habite ce capitaine désabusé qui s’abandonne à l’alcool en faisant le constat de sa vie : « Hé qu’est-ce qui tourne dans ma tête ? – Une sirène qui s’apprête – Au chant… au temps… ce chant… – Oh ce chant qui enivre mon être – J’ai le cœur qui orchestre – La symphonie du temps !… » Les larmes nous viennent aux yeux à l’évocation de cet intense souvenir, l’Olympia entière s’est levée comme un seul homme pour ovationner longuement Christian et ses musiciens.
Les rappels débutent avec ‘Dignité’ et Tristan au chant, accompagné par les fans sur le refrain. Ensuite, un nouveau moment de grâce, de poésie délicate et champêtre avec ‘Ode à Emile’, où seuls Hassan à la guitare acoustique et Christian assis sur une chaise charment la salle. ‘Hymne à la Vie’, prière universelle et laïque, toujours en acoustique, nous donne des frissons de bonheur avant que les autres membres du groupe ne les rejoignent pour la reprise. A nouveau un formidable accueil du public qui applaudit le groupe à tout rompre et scandant à tue-tête « Christian ! Christian !… » Ce dernier remerciera longuement ses musiciens actuels, rendra hommage aux anciens – décédés ou encore en vie et présents dans la salle, à sa famille, au fidèle fan-club d’Un Pied Dans La Marge, et à tous les fans de toutes générations.
Un dernier titre – et non des moindres – sera le point final de cette soirée à marquer d’une pierre blanche, « Ces Gens-Là ». Cette reprise de Jacques Brel – qui avait fait ses adieux à la scène à l’Olympia, lui aussi, près de 60 ans plus tôt – est interprétée avec verve et truculence, tendue et rock, très bel hommage au ‘Grand Jacques’. Avec cette chanson Ange avait pris son essor il y a plus de 50 ans, et c’est avec elle également que Christian Décamps tire sa révérence à la scène (tout en restant actif à la composition).
Tout au long du concert se sont succédés des gestes d’affection des musiciens à leur père artistique et spirituel : regards et sourires complices entre Christian et Hassan qui lui embrassera le front en signe de respect en pleine chanson, marques d’amour filial et pudique entre Tristan et son père, Hassan et Thierry Sidhoum (bassiste) tombant dans les bras l’un de l’autre, en pleurs. Famille, amis proches et musiciens viendront sur scène en fin de concert pour entourer le patriarche et leur témoigner leur respect et leur amour. Les yeux mouillés, les cœurs emballés, la tête dans les étoiles, nous quittons à regret l’Olympia en attendant la future parution de la captation du concert.
« Le sympathique Pat O’May, le plus Irlandais des Bretons »
Mais il est pas Breton ! C’est un Rouennais ! Les Bretons ils veulent notre Mont, mais aussi nos figures locales ! 😅🤣