En ce doux samedi de septembre, le festival Pop Montréal tir à sa fin. 7h30, les gens commencent à s’agglutiner devant le Club Soda. Des jeunes et des vieux, c’est toujours rassurant de voir qu’il y a des gens plus âgés que nous. Histoire de ne pas être LE vieux con… Situer dans le coin de la plèbe, la salle de spectacle est l’une des meilleures au niveau du son et de la visibilité. Les quelques 900 billets ont trouvés preneurs. Les branleurs, déçus, devront attendre la prochaine visite du chantre joufflu ou faire affaire avec le marché noir. Belle évolution pour Ty et sa band, vu autrefois dans de plus modestes endroits.
Sacré demi-dieu par le magazine Rock N Folk, la fusée Ty Segall semble être décollée pour de bon. Si au début on le considérait comme un bon clone des Oh Sees et du défunt Jay Reatard, il faut maintenant le voir comme un prochain Jack White, rien de moins.
En plus d’être en tournée sans arrêt, comme le Bang Bus, Ty rempli les bacs à disques comme Rocco les bacs de porno. Le brillant ménestrel a même donné sa guitare à un spectateur lors d’un concert en France. La guitare utilisée sur l’album Sleeper, donné afin de tourner la page sur un épisode fortement émotif : la mort de son père.
Vers 23h, le Ty Segall Band monte sur la scène du très bondé Club Soda. Pas le temps de faire coucou, l’album Manipulator est joué à fond la caisse et pulvérise tout sur son passage. Le son est maintenant plus musclé, bien serré, mitraillé grassement, gratiné de fuzz, lourd comme du Black Sabbath joué les doigts dans la plogue. Un rock psychédélique d’une incroyable violence, du Cream joué sur une brosse de café par des fous furieux. C’est clair, le Ty Segall Band a beaucoup pratiqué pour en arriver à ce résultat. Après plusieurs pépites du dernier album, le groupe s’attaque à Slaughterhouse, c’est rapide et violent. Nos oreilles sont violées à coup de décibels. De plus en plus à l’aise sur scène, Ty se permet même de faire des blagues. Si vous êtes encore dans le rang des sceptiques après le spectacle, prenez votre pouls, vous êtes probablement mort!
Après 1h20, rappel compris, c’est la fin, le retour à la réalité. J’entends les gens parler mais je ne comprends rien, comme si tout le monde parlait comme Gérald McBoing Boing.
Il ne reste plus grand-chose de l’époque lo-fi-Ty (Melted, Lemons), et c’est une bonne chose. Le californien s’est émancipé des influences de John Dwyer et possède sa propre identité. Une chose rare.
Dommage pour les filles de La Luz, malgré une bonne prestation, le groupe alterno-surf risque de tomber dans les abysses de l’oubli. Pas évident de servir d’apéritif pour le nouveau messie du rock.
Texte : Fred Lareau