La Suisse est définitivement un terreau fertile en groupes gavés de distorsion et d’attitude rock’n roll-j’en-ai-rien-à-péter-mort-de-rire-Wilhelm-tire-sur-mon-doigt. Et pour changer un peu des métalleux barbus, voici Distoris Clitortion, premier LP de The Chikitas.
Le mouvement des groupes de rock à deux est très bien installé au Québec et ne surprend plus grand monde. Depuis qu’il y a un festival des Hommes Orchestres et que la popularité de Steve Hill s’est élargie au grand public, les duos qui ont besoin de plus d’une Toyota Echo pour tourner font presque figure de bourgeois.
Mais en Europe, la tendance est encore marginale; un adjectif tout désigné pour The Chikitas, si on le prend dans le bon sens du terme. Ce duo rock et féminin qui nous arrive de Genève joue avec talent à inventer les Beastie Girls. Le premier extrait –judicieusement nommé « lalalala »- interdit toute contradiction à ce commentaire. À ne pas écouter au volant –surtout pas en Toyota Echo- au risque, sautillant sur son siège, de provoquer un accident dont on sortirait gêné. « Pardon Madame la borne fontaine. »
Entre une histoire de sexe avec un bonhomme de neige et les harmonies apocalyptiques des tomates de ghetto, on navigue non-stop entre insolences, violence, vacances et décadence, les uns comme les autres pouvant vite être contagieux.
Si on adhère au concept –il faudrait être rabat-joie!- il n’y a pas grand-chose à jeter. C’est efficace, étonnement varié, car bordélique, tout y passe. C’est efficace, parfois superficiel, parfois très heavy, la plupart du temps jouissif. Ça donne envie de trouer son jean, d’enlever la croûte de son sandwich pain blanc et de dévaler une rue sur un caddie emprunté au supermarché.
L’attitude des deux auto-proclamées fearless girls gigging loud y est évidemment pour beaucoup. Aussi bien musicalement –le très ironique What have you said et son côté « Je vous demande pardon? »- que dans l’aspect visuel décalé-décadent. Entre les photos en costume-cravate et celles en slip, les riffs de guitare avec zéro doigt, la contrepèterie et le scratch à la bouche de l’avocate fuck off, on ne sait plus à quel saint se vouer.
Las des questions sur les filles dans le rock, elles ont même eu le mot de la fin : « Est-ce qu’on poserait la question si on était des renards? »
Que voulez-vous ajouter à cela…
Texte : Marien Joly