En tournée pour la sortie de leur 3ième album, The Agent Intellect, Protomartyr de Détroit Michigan, s’arrête à Montréal. Joe Casey et sa bande forment sûrement l’un des groupes les plus intéressants du moment, bien coté par les magazines scientifiques d’usage : Allmusic, Pitchfork. Et. Puisque il faut absolument être influencé, ici c’est du côté post-punk anglais : Wire, Gang Of Four, PIL, Siouxie et Joy Division, pour nommer que les plus connus. C’est chargé d’émotions, cafardeux comme la Motor City, en moins sclérosé.
Le groupe est mené par Joe Casey, leader apathique et anti- esthète absolu, toujours vêtu de son habit informe proche de la poche de patates. Si certains focalisent sur leur look, ce n’est pas le cas ici. A la guitare, Gred Ahee, incarnation de Barney Gumble en jeune, excelle dans son rôle. Ses riffs métalliques rappel Andy Gill de Gang Of Four. Son doigté est fin précis, tout en finesse, étonnant avec des aussi gros doigts. Il utilise même un capo pour aller chercher plus aigu. Alex Leonard, à la basse et Scott Davidson à la batterie complète la section rythmique.
En première partie vers 21h25, c’est Fred Thomas, folkeux du Michigan, établi récemment à Montréal pour épanouissement artistique. Un peu répétitif mais ce n’est pas trop mal. Suis Growwing Pain, avec deux « W », très important, à ne pas confondre avec les médiocres Growing Pains suédois, avec un « W ». Une surprise agréable, même si le garage-punk devient un petit peu trop omniprésent, quand c’est bien fait il n’y a pas de soucis. Le Ritz se remplit, lentement, je suis surpris de voir autant de gens un lundi soir. Il y a de la vie à Montréal.
Il est un peu plus de 23h quand les gars de Protomartyr se pointent, les prolétaires du rock. Joe Casey, dégaine de poivrot, regarde par terre, un peu timide avec sa bière à la main. Ses trois potes sont là, l’immense Greg qui boitille jusqu’à son coin, Alex, avec ses cheveux de princesse, et Scott le G.I. il n’y a pas plus anti-héros. Leur dernière visite à Montréal remonte a juin 2014, en première partie de Parquet Courts.
Le groupe commence tranquillement avec Maidenhead, enchaîne avec plusieurs titres, Cowards Starve se démarque, plus agressive avec ses changements de tempos. Il y a l’inquiétante Uncle Mother’s, la très lyrique Clandestine Time, marmonné par Joe, fragile derrière son micro. Ça manque un peu de peaufinage, mais moi, les choses parfaites me font profondément chier! J’aime bien le côté amateur « potes de l’usine », de Protomartyr. Entre deux gorgés de bière, Casey, affable prend même le temps de parler baseball, il souhaite bonne chance aux Jays pour les séries, l’homme est plein de bonté!
Pendant une bonne heure et quart, le groupe passe en revue son poétique répertoire qui ne passera jamais à la radio commerciale, c’est dommage. La soirée se termine avec au rappel, le hit Come & See, hymne à la désolation du deuxième album, under color of official right. L’avenir est sans lumière. Joe Casey est mon nouveau berger, sans ironie.
Texte: Fred Lareau