« Penny Dreadful » Saison 2 : fascine en glorifiant la beauté du mal

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« Penny Dreadful » continue sur sa lancée et nous offre une deuxième saison solide qui sublime avec une sombre poésie les horreurs vécues par les personnages vivant dans l’ère victorienne. Bien moins gore que la première saison, la série de John Logan parvient cependant à rester captivante et à séduire à nouveau le public dans cette suite.


Vanessa Ives (Eva Green) n’est pas encore au bout de ses peines… d’ailleurs, le sera-t-elle jamais ? Si après un combat acharné, elle a réussi à se débarrasser temporairement de Lucifer, elle est désormais la cible d’un nouveau mal à Londres, décidé à la livrer sur un plateau aux mains du Diable. Elle est toujours soutenue par un groupe soudé de marginaux composé d’Ethan Chandler (Josh Hartnett), le Lupus Dei, soit, un loup-garou américain qui doit aussi faire face à ses vieux démons ; Sir Malcom Murray (Timothy Dalton), la figure paternelle du groupe, lui-même menacé par les charmes d’une sorcière malintentionnée ; Victor Frankenstein (Harry Treadaway), ce scientifique ambitieux défiant les lois naturelles et qui a secrètement ramené à la vie l’ancienne amante du cowboy, désormais baptisée Lily (Billie Piper), à la demande de sa créature au comportement imprévisible John Clare (Rory Kinnear). Finalement, Sir Lyle (Simon Russell Beale), un homme à la personnalité pétillante vient compléter cette équipe. Parallèlement, on continue à suivre les aventures de l’irrésistible Dorian Grey (Reeve Carney).

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Que dire de cette série, si ce n’est qu’elle est brillante ? « Penny Dreadful » remet à jour des personnages populaires (Frankenstein, le loup-garou, Dorian Grey), nés au 19ème siècle, tout en maintenant les aspects gothiques et horrifiques qui les caractérisent eux et leur époque. Par ailleurs, cette série envoûte les spectateurs grâce au caractère nuancé de chaque personnage. En effet, aucun n’est infaillible, chacun a sa part de noirceur et de bonté, possède des failles, mais réussit quand même à se faire une place dans le cœur du spectateur. Tous les épisodes, sauf deux, ont été écrits par John Logan qui impressionne par sa maîtrise de la langue anglaise. Sans être pompeuse, celle-ci est en parfait accord avec la littérature du 19ème siècle (rappelons que la série se déroule dans les années 1890) et s’adapte bien au format télévisuel. Il est possible de voir que chaque phrase est mûrement réfléchie, chaque mot a un certain impact et peut devenir une arme puissante qui hante et est susceptible de marquer nos esprits au fer rouge. Chaque échange entre les individus se délecte avec plaisir et rend le spectateur affamé d’en voir toujours plus. Quant au visuel de « Penny Dreadful », celui-ci se veut tout aussi impeccable: chaque plan de caméra raconte une histoire et est doté d’un symbolisme. Les couleurs sont généralement froides, la lumière assez faible et l’image terne  joue avec les ombres pour rendre compte de l’atmosphère horrifique.

Le succès de cette série réside également dans le fait qu’elle réussit à exalter diverses émotions parfois contradictoires chez son public, par exemple en rendant ce qui est mal, beau. D’un passage émouvant, aux dialogues délicats, elle peut enchaîner sans prévenir à une séquence crue, dérangeante, où la couleur rouge détonne, impliquant des actes de violence ou d’érotisme sans retenue, mais pourvus d’un esthétisme obnubilant qui les rendent honteusement délicieux à assister. Suivre « Penny Dreadful » c’est accepter de se lancer dans une expérience émotionnelle passant continuellement d’un extrême à un autre et qui n’est possible que grâce à un casting dévoué. Si l’on peut dire sans hésiter que tous les acteurs se surpassent dans leur travail, c’est tout de même l’interprétation d’Eva Green qui mérite une salve d’applaudissements. Mmmh non, même cela parait peu suffisant. Qu’on lui jette des fleurs, des prix, voire même qu’on se mette à genoux devant une telle prouesse artistique. Green est un modèle à suivre, c’est une actrice qui n’a pas froid aux yeux. Elle est prête à se mettre dans des positions vulnérables (littéralement) et éprouvantes, de s’enlaidir pour donner à Vanessa Ives un portrait aussi réaliste que possible. Green n’incarne pas seulement, mais devient une autre personne qui lui colle à la peau et réussit à communiquer ses émotions, sans devoir piper un mot. Son sourire peut nous faire fondre, ses yeux bleus tourmentés peuvent percer n’importe quelle âme et nous laisser la porte ouverte vers la sienne, pour nous permettre de comprendre l’étendue de ce qui se passe dans sa tête. Vanessa dégage une énergie qui la rend irrésistible aux yeux des autres et des nôtres. Elle séduit sans être vulgaire, fait preuve de force même en étant envahie par la peur, est attachante même lorsqu’on connait son passé scandaleux. Les quelques épisodes, consacrés entièrement à elle, sont de loin les plus marquants, car ils nous donnent la possibilité de passer plus de temps pour découvrir en profondeur la complexité de son personnage.

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« Penny Dreadful » porte aussi tout son intérêt dans les thèmes qu’il traite. Il parle bien évidemment de religion en abordant le sujet du bien, du mal, de Dieu, du Diable, ainsi que de rédemption. La série s’intéresse à faire comprendre au spectateur qu’il ne faut pas s’arrêter aux premières impressions et aux apparences, qui sont bien trop simples et limitées. La réalité est plus complexe et nuancée. ATTENTION SPOIL SAISON 1. John Clare, que l’on a vu pénétrer le torse d’un homme de ses propres mains pour l’ouvrir en deux dans la saison précédente, ne se révèle pas être une créature sans pitié, ni sentiments. FIN DU SPOIL. C’est un personnage sensible, qui raffole de poésie, rêve d’être accepté et de trouver une partenaire. « Penny Dreadful » prône aussi la tolérance, plus particulièrement, la beauté de ce qui est différent. Chaque personnage transgresse les normes de la société : Vanessa est maudite, John Clare est physiquement monstrueux, Angélique, la nouvelle conquête de Dorian Grey est transsexuelle, etc. Avec la naissance Lily, ce show télévisé développe d’avantage le thème de la misogynie. Le personnage de Billie Piper incarne une vision féministe extrême dans laquelle les femmes veulent prendre le pouvoir, écraser les hommes pour ne plus être rabaissées ou utilisées comme des marionnettes.

Au vu de toutes les qualités de cette série, c’est donc avec une larme à l’œil et un paquet de mouchoirs à proximité, que nous avons appris que « Penny Dreadful » s’achevait au bout de la troisième saison, ceci non en raison d’un faible taux d’audience, mais tout simplement car John Logan voulait que l’histoire de nos chers personnages, s’arrête à ce moment-là. Heureux d’avoir pu prendre part à cette aventure, nous nous sentos tout de même maudits qu’elle se finisse si tôt.

Diana Jeronimo

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N° 151 - Avril 2023
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