Edouard Graham
Déjà auteur d’un livre sur Joni Mitchell ( »Joni Mitchell, Songs are Like Tattoos ») chez le même éditeur, le chercheur en littérature Edouard Graham s’attaque maintenant à un des projets avortés les plus célèbre de l’histoire du rock, là-haut avec l’album Smile des Beach Boys. Un projet invisible depuis sa création, »The Rolling Stones Rock And Roll Circus ». Pourquoi les Stones ont -ils décidés d’enterrer ce projet fou mais magnifique qui mettait en vedette, The Who, Jethro Tull, Marianne Faithfull mais aussi un super groupe incluant John Lennon à la guitare, Eric Clapton au triangle, mais non à la guitare, Keith Richards à la basse et Mitch Mitchell ( »Jimi Hendrix Experience ») à la batterie. Pourquoi ? C’est une des questions auxquelles tente de répondre Edouard Graham au long de ces 166 pages.
En 1967, les Beatles sortent un des plus grands albums de tous les temps, »Sargent Pepper Lonely Heart Club Band » et consolide ainsi leur position de leader de la planète rock. La même année les Rolling Stones se sont vautré en singeant leur grand rival avec »Their Satanic Majesty Request ». Des accusations de possession de drogue ne font rien pour arranger les choses. Massacré par la presse et une partie de son public, la bande à Jagger se retrouve dans une impasse et doit trouver un moyen de retrouver les faveurs du public. Jagger et Richard s’accordent sur un point : le Flower Power n’est pas pour eux. Trop de paix et d’amour, pas assez d’agressivité, de stupre et surtout pas assez de blues rempli de sueurs.
Portant maintenant Brian Jones comme une croix, le groupe s’enferme en studio et décide de revenir à ses valeurs premières, le blues et le rock and roll. Le groupe est à nouveau au sommet de son art lorsqu’il termine l’enregistrement de »Beggars Banquet ». Mais voilà. Comment promouvoir ce grand retour ? Une tournée ? Rien de prévu à ce moment-là. La télé traditionnelle ? Le playback n’est pas une option pour le groupe qui refuse de jouer les pantins factices. Il faut trouver un moyen de prouver que le groupe est de retour et redorer son image ternie par le psychédélisme.
Alors que Mick Jagger est sur le tournage du film qu’il produit : »Performance », Sandy Lieberson, qui s’occupe aussi des projets cinématographiques du groupe, lance l’idée de filmer le Plus Grand Groupe De Rock And Roll live dans le cadre d’une émission télé.
Qui propose l’idée du cirque ? Qui a choisi les groupes ? Et surtout, pourquoi le film n’est-il jamais sorti à l’époque ? Graham décortique le projet tel un chirurgien, fouille et analyse toutes les informations afin de mettre en lumière l’arrière-scène de ce projet fou.
Les anecdotes sont pléthores. Comment le guitariste Tony Iommi de Black Sabbath se retrouve-t-il à jouer avec Jethro Tull ? Pourquoi la performance de »A Quick One, While he’s Away » de The Who est-elle selon Pete Townshend, la meilleure de toute leur carrière ? Pourquoi cette invitation était si importante pour John Lennon ? Quels sont les étranges tatouages que porte Jagger dans »Sympathy For The Devil » ?
Le livre pourrait être destiné uniquement aux aficionados du groupe s’il ne mettait pas également en lumière les coulisses du monde du spectacle. Celui du rock en particulier. Il éclaire aussi sur les liens entre le rock et le cinéma (voir le chapitre sur les premiers clips).
Un autre très bon livre sortit chez Le Mot et Le Reste. [Serge Mailloux]