La Suisse est lente à la détente quant au cycle du cool, on le sait bien. Peu de surprise, alors, lorsqu’on découvre un groupe des mois et des mois après le reste du monde ; c’est ce soir le cas pour October Drift – et sur ce coup-là, on a bien plus que quelques mois de retard.
En effet, le quartet British écume le Royaume-Uni à guichets fermés (littéralement) depuis la sortie de son premier single, ‘Whoever’, début 2015, et ça se comprend : un de ces groupes qu’il faut découvrir en live, d’une intensité rare. Entre leur son lourd – une espèce de post punk s’il était joué par des post rockeurs via un power rock nourri d’un wall of sound étouffant – et leur performance scénique, la claque est monumentale.
Première chanson, le chanteur Kiran Roy tient sa guitare comme un fusil, frontal, urgent et assumé jusque dans la gestuelle, et pourtant, s’installe au fil du set une intimité qu’on attendait pas, jusqu’à la dernière chanson chantée depuis le public.
Le public romand est aussi chaud qu’il puisse l’être (en tout honnêteté, rarement l’a-t-il été autant après une première partie, mais pour le coup, on en attendait pas moins) et la crainte que l’ambiance retombe comme un soufflé se fait sentir, mais Editors est de ces groupes qui commence fort et garde la barre très haute.
Anthémique sans jamais être cheap, leur dernier album ‘Violence’ combine les trois facettes du groupe, jusqu’à présent un peu désarticulées et éparpillées. Synthés lourds, rock de stade et ambient en dentelles font étonnamment très bon ménage sur scène, et la setlist y est certainement pour beaucoup, avec juste assez de chansons du dernier album pour le garder sur le devant de la scène (ahah) sans faire de l’ombre aux albums précédents (tous représentés par au moins deux chansons, sacré équilibre – la cohérence du set n’en est que plus remarquable).
Il faut le dire, les Docks se prêtent particulièrement bien au mix théâtralité et proximité du public via leur configuration, mais sont bien aidées par la contradiction vivante qu’est Tom Smith, l’homme le plus habité et dramatique du monde et qui pourtant ne surjoue jamais, et c’est certainement cette authenticité organique qui fait l’âme d’Editors à travers leurs mutations de style musical. Un soir placé sous le signe du spectaculaire et du poignant, de l’intensité et de l’intimité.
Texte: Jillian Blandenier
Photos: Alex Pradervand