Rebecca et Megan Lovell, les deux sœurs prodiges de Larkin Poe, ont reçu Daily Rock au festival Guitare en Scène. Entre anecdotes personnelles et réflexions sur leur évolution musicale, les deux artistes nous plongent au cœur de leur parcours artistique fascinant. C’est peu de temps avant leur concert que Rebecca et  Megan ont répondu à nos questions dans la plus grande spontanéité.

Qu’est-ce que cela vous fait d’être à Guitare en Scène aujourd’hui ?
Megan : Nous parlions justement avec Rebecca de la difficulté d’attendre parfois avant de monter sur scène. On se sent hyper bien mais on a très hâte de jouer !

Vous considérez-vous plus comme des chanteuses ou des musiciennes ?
Megan : Je me considère comme une instrumentiste. Même si pendant la première moitié de ma carrière, je me considérais comme une musicienne, je me suis prise au jeu et maintenant, j’adore chanter. Mais finalement, l’un n’existe pas sans l’autre.

Seriez-vous capable de jouer les parties instrumentales de l’autre ?
Rebecca : Ouh, intéressant ! Je ne pense pas.

Megan : Tout est possible avec de la pratique !

Rebecca : Oui, mais, non ! Il y a de très nombreuses années, j’ai expérimenté le lap steel. C’est un instrument très inconfortable, donc j’ai beaucoup de respect pour ma sœur qui s’y tient. Avec une guitare, tu peux apprendre un accord G, C ou D et progresser rapidement. Avec le lap steel, il faut énormément de temps avant que cela sonne correctement.

Rebecca (gauche) et Megan, de Larkin Poe au festival Guitare en Scène 2024.

En parlant de cela, Megan, comment as-tu commencé le lap steel ?
Megan : Il y a longtemps, nous avons commencé une formation classique, au violon. Puis un jour, j’ai entendu Jerry Douglas jouer du dobro. J’ai été incroyablement émue par le son, alors j’ai tout de suite arrêté les cours de violon pour commencer cet instrument.

Ensuite, nous avons commencé à composer, brancher les guitares et j’ai naturellement laissé tomber le dobro acoustique pour me tourner vers le lap steel électrique. De temps en temps, je reviens au dobro. C’est sympa de retrouver ce côté acoustique occasionnellement, mais la plupart du temps, je reste fidèle au lap steel.

« Avec le lap steel, il faut énormément de temps avant que cela sonne correctement. »

Rebecca, à propos de l’instrument dont joue sa sœur, Megan.

Vous avez récemment gagné un Grammy pour votre album ‘Blood Harmony’ : qu’est-ce qui a changé pour vous depuis ce moment ?
Rebecca : Je trouve que nous avons écrit des chansons vraiment cool après les Grammys ! C’est très encourageant de recevoir ce type de distinction de la part de nos pairs. (S’adressant à sa sœur) Qu’est-ce qui a changé selon toi ?

Megan : Je pense que cela améliore significativement la confiance. Quand tu es amenée à créer, tu dois croire en toi. Donc un Grammy aide forcément en ce sens !

Aviez-vous besoin de ce boost pour votre confiance ?
Rebecca & Megan : Ça n’a jamais fait de mal à personne !

Rebecca : Lorsque nous avions 14/15 ans, nous avions l’option de signer chez un gros label. Mais, on ne voyait pas l’intérêt, on ne voulait pas être bridées dans notre créativité ou que quelqu’un nous dise comment faire de la musique. Je pense que depuis, nous avons acquis une certaine foi en nos capacités et notre éthique de travail. On travaille tellement dur ! Nous avons une communauté de fans incroyable, des amoureux de la musique qui soutiennent ce que nous faisons. On n’a jamais été en manque de confiance, mais… Plus tu avances dans l’âge, plus tu apprécies d’être accueillie dans un monde où tu trouves une résonance. Même venant d’une industrie dont on n’a jamais fait partie.

‘Bluephoria’ est sorti le 12 juillet dernier. Pouvez-vous en dire plus sur ce morceau : qui l’a écrit ? composé ? quelles ont été les influences ?
Megan : C’est une chanson qu’on a écrite ensemble, avec Tyler Brant, le mari de Rebecca, qui est aussi notre co-producteur. Nous l’avons enregistrée dans leur studio, qui est en fait leur sous-sol. C’est donc un endroit très confortable pour travailler ! (rires)

Rebecca : Aussi, je pense que le fait d’avoir été programmées pour jouer avec les Black Crowes est resté dans un coin de notre tête pendant nos sessions d’écritures. Nous étions tellement excitées par cette opportunité ! Ils ont toujours été une grande source d’inspiration pour nous, leur musique reste intemporelle. Ce morceau possède donc une certaine énergie puisée chez les Black Crowes : une vibe rock sudiste, avec un côté psychédélique. Les paroles, dont je suis très fière, évoquent la dualité chez l’être humain. Cette manière d’être parfois content, mais aussi très triste en même temps qui existe en chacun de nous.

Vos créations à venir prendront-elles de nouvelles directions musicales ?
Megan : S’agissant des paroles, je pense que nous approfondissons de plus en plus nos vulnérabilités et partageons les histoires qui ont vraiment du sens pour nous. Lorsque nous écrivons ces derniers temps, nous nous nous demandons : « est-ce quelque chose que je ressens réellement moi-même ? » C’est très puissant de pouvoir partager ces émotions avec un membre du public. Approchant la trentaine, je ressens le besoin de me dévoiler avec honnêteté.

Rebecca : Sur le plan sonore, nous parlions justement entre nous du fait qu’AC/DC fête son 50ᵉ anniversaire. Lorsque tu écoutes chaque album d’AC/DC, tu entends quoi ? La guitare, la basse, la batterie et le chant. On ne peut nier la puissance et la simplicité du rock lorsqu’il est réduit à ses éléments essentiels.

Megan : En fin de compte, j’aime les albums dont la présentation est très austère, où finalement, ce ne sont que des humains qui jouent de la musique ensemble. Je pense donc que plus nous avancerons dans le temps, plus nous continuerons à nous appuyer sur ce genre de performance très brute et organique. Du simple rock’n’roll.

Qu’avez-vous appris l’une de l’autre musicalement d’une part, et sur le plan humain d’autre part ?
Rebecca : Oh j’adore cette question. Merci ! Megan dit toujours qu’« il faut moins s’écouter, et plus écouter les autres » sur scène. Ce qui est parfois contre-intuitif. Car quand je suis sur scène et que j’ai peur de me tromper, la tentation de m’écouter est grande. Donc, dans ces moments de nervosité, je pense à ce précieux conseil que j’ai appris de ma sœur : savoir s’éloigner de soi-même.

Megan : (S’adressant à sa sœur) Récemment, j’ai appris grâce à toi, le pouvoir de l’action. Comme faire le premier pas. C’est difficile, mais si tu l’acceptes, le simple fait d’agir – même si ce que tu fais n’est pas parfait, est puissant. Et je pense que grâce à cela désormais, je parviens à me jeter à l’eau !

Rebecca : Il est intéressant de constater que nous sommes des personnes très différentes, même si nous sommes sœurs. Mais avec le temps, je pense que nous nous ressemblons davantage.

Si vous deviez résumer l’essence de Larkin Poe en quelques mots, quels seraient-ils et pourquoi ?
Megan : racines, rock’n’roll et sœurs, parce que nous sommes très connectées musicalement à nos racines. C’est très important pour nous et pour notre relation de sœurs. Ces trois valeurs sont les piliers essentiels de Larkin Poe.

Rebecca : Amen !

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Interview : Floriane Piermay
Photos : Jacques Apothéloz

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